Objectif Soins n° 246 du 01/05/2016

 

Actualités

Aveline Marques  

Recommandation La Direction générale de l’offre de soins va diffuser un guide, alternant recommandations et mises en garde, à destination des nombreux établissements de la Fonction publique hospitalière qui sont tentés par cette organisation du temps de travail.

Longtemps l’apanage de la réanimation, des urgences et des maternités, les 12 heures gagnent du terrain. Face à cette “tendance”, la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) a mis en place un groupe de travail chargé d’élaborer des recommandations.

Ni pour, ni contre, le document pratique présenté au Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière comporte un grand nombre de mises en garde à destination des établissements tentés par la mise en place de cette organisation du temps de travail. Et pour cause : la littérature scientifique montre que le travail en poste d’amplitude en 12 heures a des effets sur la santé des personnels (fatigue, troubles du sommeil, troubles de l’attention, conduites addictives, prise de poids, risques de cancer du sein…) et sur la sécurité des soins (risques d’erreurs et d’événements indésirables).

Dérogatoire, la mise en place des 12 heures est conditionnée par le respect de deux critères réglementaires : les contraintes de continuité du service public doivent l’exiger en permanence ; le comité technique d’établissement doit rendre un avis. Si les services de grands brûlés, les urgences, la réanimation, les maternités et la gériatrie semblent bénéficier « d’une sorte de présomption de contrainte de continuité du service public », notent les membres du groupe de travail, la justice administrative a pu invalider la mise en place des 12 heures dans d’autres services. L’attractivité de cette organisation auprès des personnels, même dans un contexte de pénurie, n’est pas toujours une raison suffisante pour les tribunaux. « Si cette difficulté n’est pas identifiée et réglée pour elle-même, l’organisation du travail en postes d’amplitude de 12 heures a peu de chance de la résoudre », pointent les auteurs du document. Il convient donc au préalable d’identifier les besoins et « d’étudier les alternatives ». Autres pré-requis : informer les personnels des risques encourus, rechercher le volontariat des agents et prévoir une autre modalité horaire. « Le travail en 12 heures n’est pas recommandé pour les personnes effectuant des tâches nécessitant une vigilance importante ou pour celles exposées à des efforts physiques importants », précise le groupe de travail.

La durée de travail hebdomadaire n’excède pas 44 heures pendant une période de 7 jours glissants (48 heures avec les heures supplémentaires), rappelle la DGOS. « Il en résulte qu’il ne peut être planifié plus de 3 jours de travail en 12 heures par 7 jours glissants. » La fatigue étant plus prononcée la troisième journée, le rythme 2 jours de travail/2 jours de repos est à privilégier. Le personnel bénéficie d’un repos quotidien de 12 heures consécutives minimum et d’un repos hebdomadaire de 36 heures consécutives, ce qui « empêche tout dépassement de la durée maximum de 12 heures de travail ». Les temps de pause réglementaires, de transmissions sont donc nécessairement inclus… L’encadrement est appelé à opter pour une arrivée échelonnée des personnels ou pour la mise en place d’une “équipe mixte” (personnels en 12 heures et personnels travaillant en horaires classiques).

Le passage en 12 heures exclut « a priori une politique de remplacement qui ferait appel aux personnel en repos, même fondée sur la base du volontariat », souligne la DGOS. Autres préconisations : « Éviter, pour un même agent, les plannings alternant les horaires en 12 heures avec d’autres modalités horaires. »

La mise en place du travail en 12 heures doit s’inscrire dans une démarche d’expérimentation et donner lieu à un évaluation, permettant une comparaison avant/après : absentéisme, turn-over, accident de travail ou de trajet, nombre de repos journaliers inférieurs à 12 heures ou de semaines supérieures à 48 heures, recensement des événements ou “presqu’événements” indésirables… L’état physique et mental de chaque agent doit, enfin, être surveillé par le service de santé au travail.