Objectif Soins n° 251 du 01/12/2016

 

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Véronique Hunsinger  

Études Après les attentats du 13 novembre de l’année dernière, le CNRS avait lancé un appel à projets de recherche autour de la lutte contre le terrorisme..

C’était quelques jours à peine après les attentats qui avaient endeuillé la France le 13 novembre 2016 que le président du CNRS, Alain Fuchs, avait adressé à la communauté scientifique un vibrant appel à répondre aux événements en « occupant des terrains vacants, en répondant à des interrogations qui croisent plusieurs champs disciplinaires, en utilisant les techniques participatives et les compétences de tous ». Un an plus tard, une première journée de restitution a été l’occasion pour les chercheurs de présenter une quarantaine de projets sur les 66 actions retenues parmi plus de 300 propositions. Le champ de la santé a été particulièrement bien représenté. La plus vaste étude est le programme intitulé “13 novembre” qui est codirigé par l’historien Denis Pechanski et le neuropsychologue Francis Eustache. Un millier de personnes (témoins des attentats, proches, habitants du quartier et de la région parisienne et habitants de trois autres villes françaises) vont être suivies pendant dix ans afin de « comprendre la construction et l’évolution de la mémoire individuelle et collective des événements », a précisé Denis Pechanski. Parmi eux, 200 personnes vont participer à un protocole biomédical dans le but de mieux comprendre le syndrome de stress post-traumatique. Ce thème est également étudié par une équipe de l’Institut de neurosciences de la Timone à Marseille (Bouches-du-Rhône). « En situation de guerre ou d’actes terroristes, la prévalence de l’état de stress post-traumatique est considérable puisqu’elle peut atteindre jusqu’à 70 % des militaires dans les situations les plus traumatisantes, a souligné le psychiatre Pierre-François Rousseau. Nous nous sommes intéressés à la thérapie EMDR* avec laquelle on peut obtenir jusqu’à 80 % de patients en rémission mais avec des résultats très variables selon les individus. » Plusieurs équipes se sont également penchées sur les moyens de lutter contre les risques d’attaques chimiques, bactériologiques ou radiologiques. Chercheuse à l’Institut de biologie intégrative de la cellule de Paris-Sud, Martine Caroff a travaillé sur deux bactéries (Escherichia coli et Vibrio cholerae) pouvant potentiellement être utilisées comme armes de bioterrorisme. « Nous essayons de caractériser des biomarqueurs afin de mettre en place des systèmes de détection rapide en cas d’attaque », a-t-elle expliqué. Les modes de réponses organisationnelles en cas d’attaques sont également étudiés. Une équipe du laboratoire Management des organisations de santé de l’École des hautes études en santé publique s’intéresse à l’expérience de l’Éprus. Cet établissement qui gère les urgences sanitaires a développé en huit ans d’existence des aptitudes d’apprentissage particulières sur l’organisation de « petits groupes d’intervention en situation d’incertitude », disent les chercheurs. Une expertise qui peut s’avérer utile en cas d’attaques terroristes. Une autre équipe de mathématiciens et d’ingénieurs de l’Université Paris-Descartes va quant à elle travailler avec des médecins sur l’amélioration du triage et de l’orientation des patients dans les situations de crise. Autant de réponses très concrètes au risque terroriste.

* La thérapie EMDR (Eye-Movement Desensitization and Reprocessing) utilise la stimulation sensorielle des deux côtés du corps, soit par le mouvement des yeux soit par des stimuli auditifs ou cutanés, pour “reprogrammer” le mental après un traumatisme.