Objectif Soins n° 251 du 01/12/2016

 

Management des soins

Maria Crétant  

Les établissements de soins recrutent régulièrement des professionnels non cadres sur des postes de cadre de santé. Cette nomination peut être une véritable opportunité, voire un challenge, pour le salarié. Cette mise en situation permet d’investir le rôle et les missions du cadre de santé. Mais qui est réellement le faisant fonction de cadre de santé ?

Le statut de faisant fonction de cadre de santé (FFCS) n’existe pas dans la fonction publique. Comment peut-il trouver sa place auprès des équipes de soins ? Et quelle légitimité peut-il avoir face à ses pairs, les cadres de santé ? Le FFCS est un professionnel de soin. Il va devoir faire des choix, prendre des décisions et de surcroît construire une nouvelle identité professionnelle. L’accompagnement du FFCS par une personne ressource semble indispensable afin de saisir les codes et les normes du système dans lequel il se situe.

PARCOURS DES FFCS

Le chemin des FFCS est difficile à appréhender car il n’existe aucune statistique les concernant, selon la sociologue Sophie Reinhard(1). L’effectif des cadres hospitaliers, présentés par Chantal de Singly, s’élevait en 2007 à environ 45 000 personnes, soit 6 % des effectifs non médicaux des établissements publics de santé. Dans cet effectif, les FFCS représentent 0,4 %. Quelles sont les raisons qui poussent les établissements à positionner des professionnels paramédicaux sur des postes de FFCS ? Une des raisons semble être liée à la pénurie des cadres de santé. Les Directions de soins invitent les professionnels, ayant de l’ancienneté et/ou de l’expérience dans le service, à prendre le relais pour remplacer un cadre de santé. Normalement, l’objectif du parcours professionnel préalable est triple :

• vérifier que le projet professionnel est viable ;

• anticiper les bases managériales indispensables à l’exercice du métier ;

• construire un projet professionnel et personnel pour définir son propre modèle du métier de cadre.

Contrairement à certains statuts, où l’on peut lisser certaines tâches et atténuer certains contrôles, le manager n’arrive que trop rarement à cette étape. Il est sans cesse en veille et doit remettre en cause ses acquis pour réapprendre, de manière plus prononcée.

La fonction

Le rôle du FFCS n’est pas simple et il semble que “l’apprenti manager” ait de plus en plus de mal à se situer et surtout à se projeter dans des organisations mouvantes et des modes de gouvernance parfois déroutants. Idéalement, le futur FFCS devra être accompagné, sous la forme d’un tutorat, par des pairs expérimentés et volontaires. Ainsi, le sentiment d’appartenance et le partage de pratiques revêtent un aspect sécurisant pour les candidats à la fonction. Mais certains pensent(2) qu’il n’y a pas de maîtrise du métier possible avant cinq à six années d’exercice…

Quel cadre légal pour le FFCS ?

Le statut du FFCS est dérogatoire. Ni tout à fait infirmier et pas tout à fait cadre : comment peut-il devenir et être légitime aux yeux de ses pairs et de la hiérarchie ? Que faire de son parcours, de son expérience ? Si le statut de FFCS peut se révéler être une opportunité, il suppose néanmoins une mise à l’épreuve. En effet, il est nécessaire de montrer des aptitudes de management. Cette période impose au FFCS de travailler sous le regard de la Direction et de ses pairs. Il doit acquérir un certain savoir-faire pour construire une nouvelle identité professionnelle via de nouvelles compétences.

PRENDRE SES MARQUES

Se construire

Le FFCS développera ses capacités managériales. Il devra trouver son groupe d’appartenance, respecter les règles et les normes implicites et explicites des cadres de santé et construire une nouvelle identité. Mais pourra-t-il réellement se sentir légitime sans formation diplômante ? Le collectif cadre pourra également tenter de réguler le travail du FFCS, thèse que Michel Crozier(3) a développé. Selon lui, « une organisation est un ensemble complexe de jeux entrecroisés et interdépendants à travers lesquels des individus… cherchent à maximiser leurs gains en respectant les règles du jeu non écrites que le milieu leur impose, en tirant parti systématiquement de tous les avantages et en cherchant à minimiser ceux des autres »(3). D’après Paule Bourret(4), « les normes ne sont pas des moteurs du comportement mais une source cognitive majeure… elles doivent être comprises comme des ressources destinées à établir et maintenir l’intelligibilité d’un champ d’action. Elles constituent des cadres d’analyse de la conduite, les acteurs vont quelle que soit l’action tenter de la comprendre en fonction des normes »(4). Enfin, selon Crozier et Friedberg(5), l’expertise définit l’une des quatre sources de pouvoir qui permet à l’identité de devenir une cinquième ressource stratégique(6).

Développer ses compétences

Pour pouvoir tirer parti d’un minimum d’expérience, d’expertise, il ne suffit plus de détenir une compétence. Encore faut-il, selon Friedberg, « bâtir le rapport à autrui, […] construire des échanges, […] se situer dans des rapports de négociation et de marchandage, […] accepter et […] assumer des situations de dépendance personnelle et […] exploiter les opportunités qu’offre le contexte »(7). La compétence est alors plus ou moins bien intégrée à tout parcours de socialisation professionnelle. Elle s’acquiert sur la base d’apprentissage. Dès lors, le FFCS devra connaître et s’approprier ses fonctions et ses missions afin de mieux répondre aux attentes de la Direction des soins, de ses pairs, des médecins, des professionnels paramédicaux, sans oublier bien évidement, les patients et leur entourage.

COMPÉTENCES

Les établissements publics ont une organisation administrative et médicale complexe. Notamment en raison du fait que « l’hôpital s’est construit au fil de l’histoire, par strates successives qui se sont empilées au gré des réformes et de l’évolution des rapports politiques, économiques et sociaux »(8). La compétence trouve ici sa place. Elle doit favoriser et structurer la politique sociale des organisations, dans l’accompagnement de ces exigences et de ces mutations. La compétence occupe une position centrale au sein de l’analyse du travail. Ce n’est pas un simple phénomène de mode, atteignant les discours et les pratiques relatifs à la gestion de l’emploi. Le recours à l’approche par compétence traduit de profondes modifications. Car la compétence investit les organisations au moment où les contenus des situations professionnelles se modèlent. On comprend mieux les propos de Guy Le Boterf(9), qui définit la compétence comme « la maîtrise d’un savoir-faire opérationnel relatif aux activités d’une situation déterminée, requérant des connaissances et des comportements. Elle est inséparable de l’action et ne peut être appréhendée qu’au travers de l’activité ». Les cadres possèdent des savoirs et des connaissances. Ils les ont acquis en tant que soignants et mobilisés pour mener la nouvelle fonction de cadre. Ainsi, l’encadrement fait appel à d’autres savoirs, savoir-faire et savoir-être. Comment se fait l’acquisition de compétences ? La compétence ne se résume pas à un savoir, un savoir-faire ou un savoir-être. La compétence est souvent définie comme l’application de savoirs théoriques ou pratiques. Mais aussi comme un ensemble d’aptitudes ou de traits de personnalité. « La compétence est bien plus qu’un simple état, c’est un processus qui est plus qu’une simple addition de savoirs. »(9) Si la compétence ne se résume pas à une énumération, elle ne peut donc pas s’expliciter par une liste de tâches. Aujourd’hui, les situations professionnelles sont complexes et souvent imprévisibles. Le professionnel doit s’adapter, reconstruire et innover. Il doit ainsi savoir “naviguer” dans la complexité. Le professionnel doit travailler dans un contexte particulier. Il doit aussi créer ou faire évoluer son contexte de travail. L’expérience montre que le travail ne peut fonctionner sans ajustements, réaménagements et improvisations. Une procédure stricte est donc toujours incomplète ? Elle ne peut en tous cas pas prévoir tous les événements ou toutes les situations qui peuvent se présenter. C’est bien la manière de gérer la situation combinée à la singularité du professionnel et son rapport aux normes, aux règles, qui va donner naissance à ce que Guy Le Boterf appelle « la compétence réelle »(9). Il n’y a pas une seule réponse ou une seule façon de faire. Agir permettra de construire son propre chemin et in fine de développer sa propre pratique professionnelle.

Au cœur des injonctions paradoxales

Le FFCS doit développer à la fois ses compétences et gérer les injonctions paradoxales. Les injonctions pourront aller à l’encontre de ses valeurs professionnelles, voire personnelles.

Le comportement d’un individu est intimement lié à son rôle et à sa capacité à se confronter à son statut en fonction des contraintes imposées par la société dans laquelle il vit. Il définit ainsi son intégration sociale. S’il ne s’y conforme pas, il peut être exclu ou en marge de la société. Le statut social est donc générateur d’attentes et d’exigences.

Quel est le véritable statut du FFCS ? Comment peut-il être à la fois légitime et reconnu par ses pairs et par les agents ? La légitimité du FFCS prend une dimension tout autre. Le mot “légitimité” vient du latin lex qui signifie “loi”. La légitimé « est la qualité de ce qui est fondé en justice ou en équité »(10).

Construire sa légitimité

Sans ce statut de cadre de santé, le FFCS devra acquérir sa légitimité face aux soignants et face à ses pairs. Il devra peut-être identifier que la légitimité est basée sur la reconnaissance de l’autre, via ses fonctions et son rôle. Mais, pour cela, il faut accepter de changer de groupe d’appartenance pour construire une nouvelle identité. La légitimité du FFCS semble être fondée sur certaines valeurs : l’intégrité, l’équité, l’écoute et la disponibilité. De la même manière, la communication permet de créer du lien, de véhiculer des valeurs et de mettre en lumière la singularité du FFCS. Cependant, avant d’être opérationnel et reconnu, le FFCS devra identifier sa capacité à gérer ses émotions. La réflexivité semble être un outil primordial pour comprendre et ajuster sa manière d’être et d’agir. Si elle devient pérenne, elle permettrait au FFCS de comprendre et d’analyser sa pratique professionnelle. La légitimité du FFCS serait alors basée sur la capacité d’agir en s’adaptant en permanence.

Les échanges au sein d’une organisation sont très riches. En échangeant avec les autres, le FFCS construit des liens. Ces liens permettraient de faire circuler des informations, des connaissances, des formes de reconnaissance et de réputations, des mécanismes de solidarité ou d’exclusion, des rites et des apprentissages. La légitimité du FFCS semble reposer également sur sa capacité à créer des liens sociaux, à y participer, à donner et à rendre. Ces échanges, ces relations sociales donnent le sentiment d’exister, le sentiment de participer à ce construit collectif qui articule le cognitif et l’affectif, le formel et l’émotionnel. La gestion des relations apparaît maintenant évidente. Les relations de travail produisent des sentiments, des émotions, des sympathies et des antipathies, des haines et des fidélités, des déceptions et des désirs. Le FFCS devra donc apprendre à gérer ses émotions. Le FFCS devra probablement acquérir la compétence émotionnelle, voire une intelligence émotionnelle, pour choisir le mode d’expression de ses sentiments le plus approprié aux différentes situations rencontrées. Le statut de FFCS n’est pas simple, il est difficile de faire tout ce travail, de trouver toutes ces clés de compréhension sans formation. Une formation s’avère primordiale.

AVANTAGES

Pour l’institution

Pour un établissement de soin, le faisant fonction cadre présente des avantages indéniables. Il permet de pallier le manque de cadres. Il peut être parfois une source substantielle d’économie. En effet, le faisant fonction est rémunéré selon son statut d’origine (infirmier ou autre). Le FFCS n’est pas statutairement reconnu par l’obtention d’un diplôme et d’un concours sur titre.

Sur un plan plus stratégique, le faisant fonction est certainement plus malléable. Ce positionnement “entre deux” permet de maintenir deux options : il est aussi facile de le nommer à un poste que de le réintégrer dans celui d’origine.

Pour les FFCS

Si la position de FFCS présente des avantages pour l’institution, elle n’est pas dénuée d’intérêts pour le postulant FFCS. Cette mise en situation permet au professionnel d’investir des misions qui ne sont, à l’origine, pas les siennes. Mais également d’appréhender la fonction de cadre entre conceptualisation et terrain, de se donner les atouts et de l’expérience pour une réussite aux concours d’entrée en IFCS. La plupart des établissements de santé proposent à leurs FFCS des formations de préparation aux concours(12). Parfois, un contrat est même passé entre la Direction des soins et le professionnel désirant exercer cette fonction.

INCONVÉNIENTS

Le FFCS peut être facilement vu comme un “cadre au rabais”(13), situation vécue comme un handicap dans l’exercice de sa fonction. Dans quelles mesures un professionnel qui a mené à bien ses missions pendant plusieurs années, mais qui n’a pu franchir la barrière d’un concours, peut-il exercer ? Qu’en est-il de la reconnaissance des compétences alors acquises ? De l’expérience ? Quel devenir pour ces professionnels qui, après avoir eu la responsabilité et la gestion d’une équipe, réintègrent leur poste d’origine ? Quelle sera leur motivation à exercer ? Quelle est la responsabilité d’un agent de la fonction publique exerçant “officiellement”, mais sans statut légal défini ? Le FFCS exerce pourtant toutes les fonctions et toutes les responsabilités.

RESPONSABILITÉS

Le cadre de santé ainsi que le FFCS exercent leur activité professionnelle dans un environnement soumis à de nombreuses contraintes : économiques, institutionnelles et réglementaires. Il existe ainsi plusieurs responsabilités juridiques, susceptibles d’être actionnées lors de son exercice : la responsabilité civile ou administrative, la pénale et la disciplinaire. Chacune de ces responsabilités poursuit un objectif spécifique. La responsabilité peut-elle être une forme de confiance et de reconnaissance ?

CONFLIT DE LOYAUTÉ

Le conflit entre les normes, les exigences, les besoins ou les intérêts de tous ces groupes, se traduit parfois par une tension intérieure. Cette tension, qui peut aboutir au “cas de conscience”, voire à des compromis difficiles, peut être la résultante d’un conflit de loyauté. En effet, le FFCS doit parfois choisir entre deux options d’ordinaire liées et non opposées. Le conflit de loyauté peut être considéré comme un conflit intrapsychique, né de l’impossibilité de choisir entre deux situations possibles. Les incidences directes du conflit de loyauté sur le travail sont nombreuses : démotivation profonde, perte de confiance… Parfois, en fonction de la fragilité du salarié, de son environnement et de l’ampleur de l’investissement affectif qu’on peut lui demander de renier, cela peut conduire à la dépression. Le conflit de loyauté se déclenche et a plusieurs circonstances. Très souvent, il s’agit d’une situation porteuse de paradoxes lourds, où prime une déficience de cohérence entre les objectifs donnés et les moyens fixés qui peuvent s’exprimer par une communication qui ne fait pas sens pour le terrain, des carences en pédagogie de la part du manager, un climat social de résistance au changement… À l’échelle collective, ces situations peuvent conduire à des tensions sociales, à un désinvestissement de la vie professionnelle, voire à des troubles psychosociaux. Il semble indispensable d’accompagner le FFCS pour gérer et dépasser ce conflit de loyauté. L’accompagnement des FFCS est, de fait, lié à la politique de l’établissement. Néanmoins, les FFCS ont souvent recours à des personnes ressources.

CONCLUSION

Accompagner le FFCS permettrait de comprendre ses besoins et de créer des conditions favorables à son exercice. Il suffirait d’être assez proche pour comprendre et assez loin pour le laisser libre. Il ne faudrait pas occulter les difficultés, ni empêcher les changements. Accompagner impliquerait aussi de savoir évoquer avec le FFCS les échecs. L’accompagnement permettrait au FFCS d’aller vers l’autonomie, ce qui reste une condition incontournable au déploiement de la compétence. Le statut de FFCS est une formidable opportunité pour un futur cadre de santé. Mais à deux conditions : la transformation de l’expérience doit induire la compétence, et cette expérience doit amener une transformation du rapport au savoir et au pouvoir. On peut entrevoir l’impact que pourrait avoir l’accompagnement du FFCS dans la construction de sa légitimité et de son identité professionnelle.

NOTES

(1) Reinhard Sophie, L’Infirmière magazine n° 304, 1er juillet 2012, p.23.

(2) Richard Barthes, Soins Cadres n° 75, août 2010, p.22, Dessine-moi le cadre de demain…

(3) Crozier Michel, Le phénomène bureaucratique, 1963, Éditions Seuil, p.6-7.

(4) Bourret Paule, Les cadres de santé à l’hôpital, un travail de lien invisible, 2006, Éditions Séli Arslan, p.197.

(5) Crozier, M., Friedberg, E. L’acteur et système. Les contraintes de l’action collective, Éditions Seuil, 1977.

(6) Bernoux Philippe, La sociologie des organisations, Éditions du Seuil, octobre 1985, p.166.

(7) Friedberg E, Dynamique de l’action organisée, Éditions Seuil, 1997, p.290.

(8) Bonnici B. « L’hôpital, obligation de soins, contraintes budgétaires », La documentation française, Paris, 2007, p.71.

(9) Le Boterf Guy, Construire les compétences individuelles et collectives, Éditions Eyrolles 2013.

(10) Définition issue du Petit Larousse.

(11) Sur le site carnetsdesante.fr/Faisant-Fonction-de-cadres-de

(12) Chauvancy Marie-Claire, avril 2009, consultable sur carnetsdesante.fr/Faisant-Fonction-de-cadres-de

(13) Consultable sur le site legifrance.gouv.fr. Arrêtédu 18 août 1995 relatif au diplôme de cadre de santé.

LA LÉGITIMITÉ

La légitimité repose sur une autorité fondée sur des bases juridiques, éthiques ou morales. Elle permet de recevoir le consentement des membres d’un groupe. C’est un accord tacite subjectif et consensuel. Selon le sociologue Max Weber(1), le concept de légitimité se rapporte à la notion de reconnaissance sociale. C’est sans doute le cas du FFCS lorsqu’il est nommé sur un poste de cadre de santé. Il est légitime par sa hiérarchie (la Direction des soins).

→ AU REGARD DE LA LOI

« Le concept de légitimité renvoie au procédé utilisé pour rendre collectivement acceptable une décision, une désignation ou tout simplement une opinion. »(2) Mais cette “promotion” est née d’une autorité constituée. Même si cette décision est discutée et consensuelle, elle n’émane pas du collectif cadre ni de son diplôme. La légitimité évoque alors le fondement du pouvoir et la justification de l’obéissance qui lui est due. Il faut une articulation entre les règles et la loi.

→ LA RECONNAISSANCE

Le FFCS peut-il véritablement être reconnu par ses pairs ? Le FFCS faisait partie d’un groupe et d’une équipe avant sa nomination, il connaissait le fonctionnement de ce groupe, il en avait adopté les normes explicites et implicites pour être en interaction. La cohésion des groupes est basée sur la qualité du lien d’appartenance de ses membres. La qualité de l’adhésion de la personne est d’abord la résultante de plusieurs facteurs relatifs au groupe lui-même.

(1) Weber Max, Économie et société, les catégories de la société, Éditions Pocket, 1995.

(2) Télécharger le mémoire de Broussolle Damien, via le lien raccourci bit.ly/2h1YsDT

Le quotidien des FFCS

Si certains FFCS souhaitaient « essayer la fonction de cadre de santé », d’autres y voient « une opportunité, voire un challenge », en mettant « leurs connaissances et leur expertise au service des professionnels ». Cependant, la hiérarchie attend « des capacités dans la gestion des projets, dans des missions transversales ». Les FFCS devront faire face, parfois, à un écart implicite entre leurs attentes et celles de leur hiérarchie. Et pourront se sentir “dominés” par l’expertise des autres cadres.

Les FFCS devront alors apprendre à gérer leurs émotions, leur affect ; cette étape est indispensable. Parallèlement, ils devront se détacher de leur groupe d’appartenance et accepter d’être dans un nouveau groupe, celui des managers. Trouver sa place, son positionnement est parfois compliqué. La place et le positionnement traduisent une forme de pouvoir. Les ressources du pouvoir sont rattachées à « la compétence, la maîtrise des relations à l’environnement, la maîtrise des communications, les connaissances des règles de fonctionnement »*. La fonction de FFCS demande l’association de certaines attitudes : l’initiative, la fermeté, l’exemplarité et la compétence réglementaire. Le processus de légitimité serait donc une sorte de personnalisation du pouvoir, proche d’une idéologie acceptable pour les différents membres d’une organisation. Elle répond à des procédures et à des valeurs qui sont connues, appliquées et respectées par tous. La légitimité s’acquiert et s’appuie sur des compétences mais aussi sur l’équité et l’intégrité envers leur équipe. L’accompagnement des FFCS semble prendre une place importante pour construire tout cela. Il permet de saisir des éléments implicites comme le système de valeurs du groupe, le travail réel et le travail invisible. L’accompagnant pourrait également permettre de transmettre une certaine représentation du métier de cadre et les normes du groupe. Ce palier permettrait de travailler ensemble efficacement et d’être in fine reconnu, et de créer du lien, afin de mettre en place l’échange propice à la production de compétences collectives. Cela assurerait la pérennité des échanges par l’implication des différents acteurs.

* Bernoux Philippe, La sociologie de l’organisation, Éditions Seuil, 1985, p.164.