INTERVIEW En avril dernier, Véronique Ghadi a été nommée à la Direction de la qualité de l’accompagnement social et médico-social (DiQASM) au sein de la Haute Autorité de Santé (HAS). Retour sur son parcours et éclairage sur ses priorités.
Faire entendre la voix des usagers est un leitmotiv pour Véronique Ghadi. Cette double spécialiste en sociologie et en santé publique a mené des recherches, des études et participé à des projets d’accompagnement pour différents acteurs dans le domaine sanitaire et médico-social. Après avoir exercé des missions au sein de l’Irdes, l’ENSP, la Fondation de l’avenir, l’AP-HP ou encore le Collectif interassociatif sur la santé, ses travaux sur la maltraitance ordinaire dans les établissements de santé l’on conduite à intégrer la HAS en 2010. Elle a notamment travaillé à l’élaboration d’outils de promotion de la bientraitance dans les établissements sanitaires et médico-sociaux et piloté des expérimentations de démarches de qualité de vie au travail dans les établissements de santé ou accueillant des personnes âgées et handicapées. Elle est aussi co-auteur, en 2014, du rapport « Pour l’an II de la démocratie sanitaire », remis à la ministre chargée de la Santé.
À 47 ans, elle vient de prendre la tête de la toute nouvelle DiQASM, née du transfert à la HAS de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Ansem). La DiQASM est chargée d’élaborer les recommandations de bonnes pratiques relatives à l’inclusion sociale, la protection de l’enfance, l’accompagnement des personnes handicapées, des personnes âgées et de fixer le cadre d’évaluation des établissements et services sociaux et médico-sociaux.
« Depuis un grand nombre d’années, je porte la transversalité entre le sanitaire, le social et le médico-social dans mes travaux, témoigne Véronique Ghadi. J’ai pu constater au fil des années qu’il s’agissait d’un enjeu de santé majeur et pour lequel je souhaitais m’investir. Ce n’est pourtant pas simple car sur le terrain, les acteurs cloisonnent souvent leurs interventions… Mais cette conviction est aujourd’hui partagée à la HAS et j’ai l’occasion de la porter et d’essayer de la mettre en œuvre de manière effective. »
En recouvrant les champs social et médico-social, le périmètre d’actions de la DiQASM est vaste : il englobe les personnes âgées, le handicap, les addictions, la grande précarité (avec les problématiques d’hébergement notamment) et la protection de l’enfance. « L’activité porte sur la recommandation de bonnes pratiques professionnelles, organisationnelles ainsi qu’une action d’évaluation de la qualité, qui sont les métiers fondamentaux de la HAS », précise-t-elle.
Si de nombreuses recommandations ont déjà été émises dans certains domaines, « nous avons besoin de plus investir les champs de la protection de l’enfance et de l’inclusion sociale », reconnaît Véronique Ghadi. Elle souligne en outre qu’un « grand défi » à venir concerne « l’évaluation, en repensant les modalités d’évaluation interne et externe des établissements et la politique d’indicateurs pour porter un regard sur la qualité ». La priorité dans ce domaine sera donnée à l’évaluation de la satisfaction des personnes accompagnées et de leurs proches en Ehpad et des personnes handicapées. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a d’ailleurs formulé une demande très explicite de recueil de satisfaction des résidents.
« Je porte la question de la place des usagers, de leur participation, de leur engagement depuis de nombreuses années. Ne pas recueillir leur point de vue sur la qualité de l’accompagnement paraît anachronique. Même si cela est très compliqué au niveau méthodologique, c’est aujourd’hui indispensable. », analyse Véronique Ghadi.
La directrice de la DiQASM entend donner la parole aux premiers concernés pour lutter contre la maltraitance, persuadée que celle-ci « se nourrit de la vulnérabilité et du silence ». Elle compte en outre cibler des actions auprès des cadres de santé, « qui sont les plus à mêmes de porter nos messages au plus près des équipes. L’encadrement intermédiaire est une place difficile, pris entre des injonctions contradictoires. Mais les questions de qualité donnent du sens à leur travail. Nous avons une alliance évidente à construire entre cadres de santé et la DiQASM. »