Objectif Soins n° 272 du 01/12/2019

 

Qualité & Gestion des risques

Dossier

Concetta Bonomo  

L'engagement dans la profession d'infirmière a longtemps été associé à l'idée de vocation. Cette recherche apporte des éclairages sur l'accompagnement proposé aux étudiants et cherche à comprendre quel rôle il joue dans le processus de professionnalisation des futurs infirmiers diplômés d'État (IDE). De quel accompagnement s'agit-il ? Comment se définit-il ? Qu'apporte-t-il ? La formation, qui adapte déjà ses contenus aux évolutions technologiques, aborde-t-elle également l'évolution sociétale et tient-elle compte des difficultés rencontrées par les professionnels sur le terrain ? Comment l'étudiant conjugue-t-il cette double adaptation ? Notre travail d'analyse s'inscrit à la fois dans l'approche des histoires de vie en formation et dans celle de la sociologie des professions.

Pour analyser le corpus de textes produits dans le cadre du suivi pédagogique de dix-neuf étudiants en soins infirmiers, entre septembre 2014 et janvier 2018, nous avons mobilisé les notions d'identité professionnelle et de rites de passage. Cela nous a permis d'identifier chez les étudiants quatre parcours différents, et de reconnaître les missions des responsables de suivi pédagogique comme celles d'un « passeur ». Les particularités de la relation créée font émerger par ailleurs le bénéfice des espaces d'élaboration nécessaire au travail d'adaptation en lien avec le contexte des unités de soins qui existe en 2019.

Notre recherche concerne l'accompagnement des étudiant(e)s en soins infirmiers (ESI) au sein des instituts de formation en soins infirmiers (IFSI), et plus précisément leur suivi pédagogique.

En effet, avec la mise en place du dernier référentiel de formation en 2009 (1), nous avons vu apparaître la figure de responsable de suivi pédagogique (RSP), dont les missions sont souvent méconnues par les professionnels. D'ailleurs, les textes de loi apportent peu de précisions sur le déroulé de ce suivi et sur sa mise en œuvre.

Cette recherche vise à apporter des éclairages sur l'accompagnement proposé aux étudiants et cherche à comprendre quel rôle il joue dans le processus de professionnalisation des futurs infirmiers diplômés d'État (IDE).

La question de leur préparation à l'exercice de la profession prend une dimension encore plus forte aujourd'hui, en 2019, où le vécu de la profession d'infirmier(ère) est souvent associé à des notions de pénibilité, voire de souffrance au travail. Des témoignages personnels envahissent les réseaux sociaux et les médias. On parle de burn-out, et de plus en plus d'IDE mettent un terme à leur carrière. Celles et ceux qui choisissent de faire de leur métier une aide à autrui sont aujourd'hui, eux-mêmes, en difficulté.

De son côté, la Fédération nationale des étudiant(e)s en soins infirmiers a édité en septembre 2017 un dossier de presse intitulé « Mal-être des étudiant(e)s en soins infirmiers : il est temps d'agir ». Celui-ci expose les risques psychosociaux auxquels sont confrontés les ESI, en lien avec la précarité de leur statut, la dégradation de leur santé physique, mais aussi en lien avec leurs vécus de stage. Il expose différents témoignages d'ESI exprimant une réelle souffrance ressentie au cours de leur formation, et leur besoin de soutien.

La formation, qui adapte déjà ses contenus aux évolutions technologiques, aborde-t-elle également l'évolution sociétale et tient-elle compte des difficultés rencontrées par les professionnels sur le terrain ? En quoi consiste cet accompagnement ? Comment se définit-il ? Qu'apporte-t-il aux étudiants ?

Nous nous sommes intéressés aux méthodes proposées dans le suivi pédagogique et avons cherché à comprendre ce qui pouvait permettre à chaque étudiant de réaliser individuellement le processus lui permettant de devenir IDE, et exercer sa profession sereinement.

Matériel et méthodes

Le référentiel de 2009 évoque la notion de suivi pédagogique, sans pour autant préciser les missions des formateurs qui occupent cette fonction, ni la (ou les) formation(s) nécessaire(s) à cet exercice. De ce fait, le dispositif de suivi pédagogique se décline de façon différente selon les IFSI. Pour réaliser cette recherche, nous avons étudié un dispositif d'accompagnement pédagogique mis en place au sein d'un IFSI qui accueille des promotions de soixante étudiants. Nous nous sommes appuyées sur les théories des histoires de vie de Gaston Pineau, notamment les méthodes d'acquisition des savoirs et la place des apprentissages par l'expérience, pour identifier le caractère singulier des relations créées dans le cadre du suivi pédagogique.

Dans cet IFSI l'ensemble de la promotion est réparti entre les formateurs, et les sous-groupes d'étudiants ainsi formés sont accompagnés par le même formateur sur les trois années de formation. Le temps de suivi pédagogique est divisé en suivis dits « collectifs » et en suivis dits « individuels ». Les suivis collectifs se font par groupe d'étudiants. Ce sont des temps de travail inscrits dans l'emploi du temps des ESI, avec un ordre du jour établi à l'avance (tels que la préparation des objectifs de stage, des séances d'analyse de pratique, etc.). Les suivis individuels correspondent à des entretiens avec le formateur identifié comme responsable de suivi pédagogique, d'une durée qui varie entre trente minutes et une heure, en fonction de la situation de l'ESI, du formateur et des sujets abordés. En dehors de ces moments formalisés, les ESI et le RSP peuvent échanger par mail, ou lors de situations créées par le contexte pédagogique (avant ou après un cours, lors d'une visite de stage, etc.).

Nous avons analysé le corpus de textes produits dans le cadre du suivi pédagogique de dix-neuf étudiants en soins infirmiers (synthèses de stage, comptes rendus des rendez-vous, contrats pédagogiques, fiches de renseignements administratifs, notes personnelles des formateurs, mails échangés). L'échantillon retenu est issu de deux promotions différentes. La période étudiée correspond aux suivis pédagogiques réalisés du début de leur formation au sein de l'IFSI jusqu'à leur cinquième semestre, entre septembre 2014 et janvier 2018.

La profession de soignant est une « profession de l'humain », et le quotidien s'apparente à une succession de rencontres. Pour les ESI, il s'agit certes de rencontres avec des professionnels, dans différents domaines, mais aussi avec des bénéficiaires de soins, des proches, des aidants... Les sciences humaines ne sont pas des sciences « exactes », et une adaptation à la singularité de la relation est toujours réalisée. Chaque apprenant arrivant dans la formation pour devenir IDE n'est pas vierge de connaissances. L'exemple le plus remarqué reste les aides-soignants en évolution professionnelle, mais c'est bien un constat général sur l'ensemble des étudiants.

La relation de suivi pédagogique : un dispositif d'accompagnement proche de la démarche des histoires de vie en formation

La relation de suivi pédagogique prend donc naissance à un carrefour entre « d'où je viens » et « où je vais ». Plusieurs éléments de comparaison ont pu être mis en parallèle entre l'approche en histoire de vie et le dispositif d'accompagnement lors des suivis pédagogiques de l'IFSI étudié pour ce travail.

Nous retrouvons, par exemple, l'explicitation des motivations et la cartographie des compétences. Il s'agit en quelque sorte d'un état des lieux au commencement de la formation, avec une démarche proche de la démarche d'« autobiographie raisonnée », d'Henri Desroche. Ensuite, nous y retrouvons la notion de contrat. Celui-ci peut être officiel et retranscrit pour des modalités pédagogiques. Mais il existe aussi des contrats moraux et implicites, se traduisant par des rendez-vous fréquents et rapprochés avec l'ESI, afin d'accompagner un moment particulier de la formation, mettant en exergue l'importante relation de confiance et l'engagement mutuel qui existent. De plus, nous retrouvons un travail de biographisation à travers l'exercice des « analyses de situations » qui sont échangées. Il s'agit d'un exercice personnel d'écriture sur une situation vécue en stage par l'ESI et adressée au RSP. Dans ces écrits, l'ESI se décrit dans une situation qu'il a choisi de raconter. Il se met en jeu, se raconte, décrit ses émotions, ce qui l'interpelle et tente de réaliser une analyse. Le responsable de suivi pédagogique se positionne en personne ressource, face à l'ESI qui est en personne projet (2). Pour finir : les spécificités du formateur, qui mobilise à la fois les éléments de sa formation théorique mais aussi celles de sa formation expérientielle, et sa part de créativité dans l'accompagnement proposé, font écho aux spécificités du formateur que décrit Alex Lainé (3).

De leur côté, les sciences humaines et sociales offrent des éclairages intéressants notamment autour de la définition de la formation professionnelle comme une étape de socialisation secondaire (4). La formation pour devenir IDE intervient donc comme une étape dans un parcours de vie. Le sociologue F. Davis (5) s'est particulièrement intéressé à la construction de l'identité professionnelle des IDE qui se fait elle aussi par étapes. Il en définit six : « l'innocence initiale », « la reconnaissance de l'incongruité » (choc avec la réalité), « le déclic », puis « la simulation du rôle » (la mise en œuvre du rôle attendu, l'étudiant répond aux attentes du groupe), « l'intériorisation provisoire » et « l'intériorisation stable » (avec l'acquisition des réflexes professionnels et l'incorporation du rôle infirmier). Là encore, on perçoit une chronologie, une progression. La formation des ESI apparaît comme une « trajectoire ».

La formation pour devenir IDE : un rite de passage

La notion de trajectoire évoquée dans les histoires de vie, et l'identification des étapes majeures dans le dispositif de formation nous ont permis de regarder la formation comme un parcours, et nous avons remobilisé les recherches anthropologiques d'Arnold Van Gennep (6) en considérant la formation préparant à l'exercice de la profession d'IDE comme un rite de passage. Il distingue trois phases qui caractérisent ces rites : une séparation par rapport à un état antérieur, une période de latence, et une agrégation par rapport à un nouvel état ou à un nouveau collectif. En observant le déroulé des années d'études des étudiants et les données recueillies dans le cadre des suivis pédagogiques, nous pouvons clairement identifier et caractériser ces trois phases pour la formation préparant à l'exercice de la profession d'IDE.

Première phase, dite phase de séparation (7)

Le premier semestre est celui des découvertes (nouvelles techniques, nouveau vocabulaire, nouvelles tenues, etc.) et de la séparation (éloignement parfois géographique des proches, décalage dans les rythmes de vie avec les horaires en stage, échanges limités sur la pratique du fait du secret professionnel, etc.). À partir de ce premier semestre les ESI sont vêtus comme des IDE, ils utilisent un vocabulaire professionnel, vivent au rythme des professionnels..., pour autant ils ne sont pas encore IDE : « Au cours de cette période de marge, les candidats ont échappé à un monde sans être encore intégrés dans un autre. » (8)

Deuxième phase, dite période de latence (9)

Il s'agit d'une période entre deux temps, qui correspond à la période qui s'étend du semestre 2 au semestre 5 (S2, S3, S4 et S5). Au cours de cette période, les expériences de stage se multiplient et les apprentissages augmentent. C'est une période d'autonomisation, qui varie d'un étudiant à l'autre. Chaque ESI passe par les mêmes étapes, mais pas au même moment.

Troisième phase, dite phase d'agrégation (10)

Cette phase est la dernière et clôture le rite de passage. Elle amène à un changement de statut. L'affichage des résultats et la cérémonie de remise des diplômes sont des événements festifs : applaudissements, cris ou larmes de joie, partage de denrées alimentaires et de boissons. « Le retour chez les siens, avec un statut supérieur, est aussi, pour lui et pour ceux qui l'accueillent, une fête, et cette fête se marque par des chants, des danses, des processions solennelles. » (11) C'est aussi, à ces périodes que redeviennent visibles les « autres » qui ont entouré l'ESI et qui ont été mis « à la marge » au début de la formation.

Les trajectoires des dix-neuf étudiants, vues à travers le prisme des rites de passage, ont ensuite été examinées sur des items précis : la durée de la formation, les résultats scolaires, les motivations et l'immersion dans les unités de soins.

Résultats

Ce travail de recherche confirme que la formation pour devenir IDE est une transformation, un passage avec ses étapes. À travers l'étude du corpus, nous avons pu identifier quatre principaux parcours pour les ESI, et considérer les missions du responsable de suivi pédagogique qui utilise les pratiques des histoires de vie dans le suivi pédagogique comme celles d'un « passeur », qui veille et accompagne à se sentir prêt.

Des parcours différents

Les parcours des étudiants ont été observés à travers leurs résultats scolaires, leurs motivations et leur immersion dans les unités de soins. Cela a permis de les classer en quatre catégories :

• les étudiants qui mettent un terme à leur formation (12) : les « cygnes ». Cette dénomination fait allusion à l'histoire du petit canard qui ne s'est jamais senti à l'aise, et qui finalement s'avère être un cygne. Les ESI ont fait le choix de devenir IDE, ils renvoient l'image de personnes investies et motivées, font preuve de persévérance, ont de bons résultats théoriques. En revanche, l'immersion dans les services de soins est source d'inconfort. La trajectoire prend alors un virage catégorique : ils quittent la formation.

• les étudiants pour lesquels tout semble se dérouler sans intervention du RSP : les « roses ». Cette métaphore a été choisie pour faire le parallèle avec les plantes qui poussent « seules » ; petit à petit, la fleur s'ouvre et s'épanouie. C'est un processus qui semble naturel, dans lequel nous avons l'impression qu'il n'y a pas besoin d'intervenir. Les étudiants apprennent au fur et à mesure des enseignements, entendent les remarques qui leur sont faites et en tiennent compte. Ils sont en général discrets dans les cours, et participent activement aux travaux pratiques. Ils sont ponctuels, font preuve de rigueur dans l'envoi des travaux demandés. Leur motivation pour devenir IDE est assez forte. Pour certains leur projet professionnel est déjà identifié dès leur entrée à l'IFSI. Les stages se déroulent sans difficultés. Les intégrations dans les équipes se passent bien. Pour autant, il est quand même nécessaire de veiller aux bonnes conditions de la formation, s'assurer que tout se passe bien, et parfois « arroser de quelques compliments » ;

• les étudiants pour lesquels il existe une période de difficulté au cours de la formation : les « poussins ». Cette métaphore a été choisie à cause de la similitude avec le poussin qui doit casser sa coquille pour sortir et enfin être autonome. Il y a un passage qui est difficile, qui peut prendre du temps, et des choses qui se brisent. Il arrive que l'ESI pleure pendant les rendez-vous (13). Il n'est pas rare que des « suivis rapprochés » ou des contrats pédagogiques soient réalisés. La formation pour ces ESI peut durer plus de trois années (interruptions ou redoublements). Que ce soit les résultats scolaires, les motivations, ou l'immersion dans les stages, nous constatons dans ce parcours qu'il y a un « avant », avec une période vécue comme difficile, un temps de travail personnel associé à une prise de décision (le poussin casse son œuf), et un « après », où l'ESI est transformé et réalise des démarches en autonomie (le poussin peut avancer sur ses pattes). Même s'il n'est pas toujours possible de décrire de façon précise à quel moment la transformation a eu lieu, il est possible de décrire de façon précise le changement chez l'étudiant ;

• les étudiants qui ont fait le choix de faire une césure : les « papillons ». Cette métaphore a été retenue en lien avec le temps passé dans le secret du cocon et qui donne lieu après cela à un papillon. Ces étudiants souhaitent suspendre leur formation sans qu'aucune raison économique, sociale ou pédagogique ne s'impose à eux. À leur reprise, ils s'intègrent très vite dans la nouvelle promotion, valident aisément l'ensemble des unités d'enseignement, et les stages se passent bien.

Quel que soit le type de parcours, la formation transforme. Quel que soit le type de parcours, le RSP accompagne cette transformation.

Le responsable de suivi pédagogique : un « passeur » qui veille

Si la formation est vue comme un rite de passage, le RSP occupe donc le rôle de passeur. Il porte avec lui des missions de transmetteur de valeur et de sens. Il est l'ancien qui sait, qui est déjà passé lui-même par ce rite de passage, et qui le fait pour plusieurs individus. Il laisse celui qui effectue ce rite avancer sur son chemin. Il laisse l'ESI suivre son itinéraire, franchir ses étapes. Il l'observe. Il est en état de vigilance par rapport au déroulé de la trajectoire. Il veille aux zones de fragilité au début de la formation, il repère les ressources et les faiblesses, il veille au bon déroulement de la formation, il intervient lors des périodes de tumulte où l'étudiant vit des expériences difficiles voire douloureuses... D'une façon générale, il veille au bon déroulement du rite de passage. Les éléments biographiques recueillis dans ce dispositif d'accompagnement et en lien avec les pratiques des histoires de vie apparaissent comme des ressources pour les actions qu'il propose.

Un positionnement d'accompagnement, pour une étape clé dans la construction identitaire : « se sentir prêt »

La relation entre le RSP et l'ESI est singulière ; elle inclut de la confiance, de la disponibilité, de l'implication, de la créativité et des capacités d'adaptabilité. Le RSP adopte une posture symétrique (14) qui permet, de façon individualisée, d'offrir un espace de travail dans lequel s'évoquent et s'élaborent les étapes de la construction identitaire du futur IDE. L'ESI a besoin d'être accompagné pour réussir la difficile équation qui consiste à agir en respectant ses valeurs personnelles et professionnelles, et en respectant la clairvoyance des contraintes du terrain. Grace à cet espace de travail, l'étudiant parvient à se sentir prêt pour exercer au quotidien la profession d'IDE.

Discussion et conclusion

Nous avons vu que la formation peut s'apparenter à un rite de passage – un début, un milieu, une fin – et que chacune de ces étapes est importante. Nous avons identifié quatre parcours pour traverser le rite de passage permettant de devenir IDE. Cette catégorisation peut servir de repère pour les formateurs afin d'identifier dans les profils des étudiants qu'ils accompagnent la métamorphose qui s'opère, la façon dont elle s'opère et ainsi ajuster et personnaliser l'accompagnement proposé.

Cette recherche vient également redonner à l'exercice de suivi pédagogique sa place singulière et indispensable dans le contexte de la formation préparant à l'exercice de la profession d'IDE aujourd'hui. La notion de « passeur » précise les missions de veille et d'accompagnement des responsables de suivi pédagogique et légitime la place des formateurs en IFSI dans un contexte d'universitarisation.

Il ressort également que la relation pédagogique construite en s'appuyant sur les pratiques d'histoire de vie apparaît comme un atout considérable pour permettre l'accompagnement nécessaire au processus de professionnalisation des ESI.

Enfin, les particularités de la relation créée entre ESI et RSP font émerger le bénéfice des espaces d'élaboration nécessaire au travail d'adaptation en lien avec le contexte des unités de soins qui existe en 2019. Avoir un espace de réflexion et « se sentir prêt » apparaît comme une étape incontournable pour poursuivre et achever le processus de professionnalisation. Le « déclic » (15) que F. Davis a théorisé en 1966 est toujours d'actualité dans le parcours des ESI. Mais, aujourd'hui, il a besoin d'être suivi d'un temps d'élaboration permettant de faire cohabiter contraintes du terrain et valeurs, d'un temps de réflexion pour que l'ESI « se sente prêt ». Pour pouvoir se faire, l'ESI a besoin d'être accompagné. Il doit pouvoir disposer d'un espace où peuvent se réfléchir des solutions, prendre du recul pour envisager des alternatives, exprimer des incompréhensions. Il faut un interstice pour évoquer ses questions, envisager ses réponses, et continuer à donner du sens à l'exercice de la profession. Dans notre recherche, ce travail a été rendu possible pendant les temps de relation de suivi pédagogique, et il pourrait donc être envisageable de le développer dans le cadre des accompagnements, et notamment ceux qui seront proposés avec les nouvelles modalités d'admission en IFSI.

Bibliographie

    (1) Arrêté du 31 juillet 2009 modifié relatif au diplôme d'État d'infirmier.

    (2) Henri Desroches, L'autobiographie raisonnée comme maïeutique de projet, Paris, L'Harmattan, 1989.

    (3) Alex Lainé, Faire de sa vie une histoire – Théorie et pratiques de l'histoire de vie en formation, Paris, Desclée de Brouwer, 2017.

    (4) Peter L. Berger, Thomas Luckmann, La construction sociale de la réalité, Paris, Armand Colin, 1986.

    (5) Fred Davis, The Nursing Profession, Chicago, John Wiley, 1966.

    (6) Arnold Van Gennep, Les rites de passage, Paris, Picard, 1909/1981.

    (7) En fonction des auteurs, cette phase est également connue sous le nom de « rites de marge » ou « phase préliminaire ». Nous préférons retenir ce terme de séparation car il est assez évocateur de ce qui se produit au cours du début de la formation.

    (8) Arnold Van Gennep, ibid.

    (9) Dite aussi « phase liminaire ».

    (10) Dite aussi « phase postliminaire ».

    (11) Arnold Van Gennep, ibid.

    (12) Dans les courants de pensée des histoires de vie, changer de voie professionnelle n'est pas considéré comme un échec de parcours, mais comme un « virage biographique ».

    (13) Rappelons la place de la douleur dans le rite de passage que David Le Breton qualifie de marqueur mnésique.

    (14) Maela Paul, La démarche d'accompagnement – Repères méthodologiques et ressources théoriques, Bruxelles, De Boeck supérieur, 2017.

    (15) Fred Davis, ibid.