Objectif Soins n° 273 du 01/02/2020

 

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Claire Pourprix  

PORTRAIT

Directrice de l'IFSI/IFAS René Miquel de Charleville-Mézières et présidente du Comité d'entente des formations infirmières et cadres (CEFIEC), Martine Sommelette accompagne l'évolution de la formation infirmière depuis son entrée dans la profession, en 1976. À l'heure de l'universitarisation de la formation, elle poursuit son engagement pour défendre la professionnalisation et le développement de la recherche infirmière.

En 1980, cinq ans après l'obtention de son diplôme d'infirmière, Martine Sommelette mettait déjà un pied dans la formation en prenant un poste vacant de monitrice à l'école d'infirmière du CH de Charleville-Mézières, dans les Ardennes. Diplômée de l'école de cadre en 1984, elle poursuit sa carrière de formatrice en IFSI, toujours à Charleville-Mézières, une ville qu'elle ne quittera pas : « j'ai participé à la mise en œuvre de plusieurs réformes qui ont conduit à des évolutions importantes des programmes de formation des études infirmières et aides-soignantes. Cela m'a conduite à m'impliquer sur différents projets en lien avec ces évolutions, notamment dans le cadre de la manutention des malades handicapés, ainsi que l'ergonomie et les gestes adaptés pour la manutention des personnes âgées », témoigne Martine Sommelette. Elle complète sa formation par un DU Soins palliatifs et douleur en 1996-98. « Toutes ces années ont été très riches, se souvient-elle : je me suis investie dans la formation des infirmiers, j'ai accompagné des projets d'actions de santé publique de prévention auprès des enfants et des adolescents, mise en place des évolutions de la formation pour parfaire la posture et le positionnement du formateur dans l'accompagnement de l'étudiant à sa professionnalisation. »

De la formation en soins palliatifs à la direction d'institut

En 1999, elle doit choisir : poursuivre dans la voie des soins palliatifs ou s'orienter sur la direction de l'IFSI, le poste devenant vacant. Elle opte pour ce dernier et réussit le concours pour accéder au poste de directeur. Et, en 2013, Martin Sommelette renforce sa formation avec un master en Management des établissements, services et organisations de santé. « L'IFSI/IFAS de Charleville-Mézières, c'est une équipe de 25 personnes formateurs et administratifs, 300 étudiants infirmiers en 3 ans et 80 élèves aides-soignants. En 20 ans, l'exercice de direction a beaucoup évolué. Par exemple, les Conseils régionaux sont devenus compétents pour l'attribution de subventions de fonctionnement, ce qui a nécessité de gagner en compétences en termes de financement et de budget.

Prémisses de l'universitarisation

Puis l'universitarisation a démarré en 2009. La signature des premières conventions avec des universités a conduit les deux mondes à se découvrir mutuellement, à apprendre et comprendre nos modes de fonctionnement respectifs. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir même si nous sommes entrés dans une phase d'accélération depuis 3 ans. Sur notre territoire, des maquettes d'enseignement harmonisées ont été élaborées dans la continuité de la mise en œuvre du grade licence. Nous travaillons actuellement plus en profondeur avec la création d'un département de formation paramédicale avec l'université de Reims en vue de former des infirmiers en pratique avancée. »

Le rapprochement avec l'université se fait pas à pas, et Martine Sommelette veille à la reconnaissance des valeurs et des spécificités de la formation infirmière. « Il faut être vigilant à bien expliciter à l'université qui on est, ce que l'on fait, quelles sont nos compétences. Car, même si on se connaît de mieux en mieux, le monde universitaire est très éloigné de nos pratiques. Le fonctionnement des enseignants-chercheurs, qui dispensent le savoir académique et clinique sur le terrain, chacun dans sa spécialité, est très différent de notre ingénierie pédagogique, qui repose sur l'accompagnement des étudiants par des formateurs aux multiples compétences. Un formateur d'IFSI est beaucoup plus polyvalent. Et parmi ses missions, la première est la professionnalisation, l'accompagnement individuel des étudiants. La proximité est pour nous une priorité pour réussir un enseignement de qualité. »

Au cœur des discussions avec le CEFIEC

Ces convictions, Martine Sommelette les défend aussi sous la casquette du CEFIEC, au sein duquel elle est impliquée depuis longtemps, l'IFSI de Charleville-Mézières en étant adhérent. Représentante régionale des formateurs dans les années 90, elle a occupé la vice-présidence régionale Champagne-Ardenne de 2004 à 2007 puis la présidence Champagne-Ardenne de 2008 à 2010. En 2010, elle est élue vice-présidente chargée de la vie associative au niveau national, puis présidente nationale en 2014. Elle terminera son 2e mandat en juin prochain. « Être au fait de l'actualité, défendre des dossiers, participer aux réunions du ministère et interministérielles sur l'universitarisation, donner la parole aux instituts que l'on représente, réfléchir à la stratégie, la politique, faire des propositions pour servir l'évolution de la profession et donc de la formation : le travail mené avec le bureau du CEFIEC est passionnant. »

L'enjeu de l'universitarisation et du développement des sciences infirmières est au cœur des actions du CEFIEC. Son objectif est de faire de la profession infirmière un acteur incontournable dans le système de santé. Pour ce faire, le comité a beaucoup travaillé pour se rendre davantage visible, afficher un positionnement clair en misant sur des propositions écrites, transmissibles. Après avoir publié 11 propositions pour l'intégration des formations en santé à l'université à l'attention des candidats aux élections présidentielles en 2017, le comité a récemment publié un tome 2 pour les années 2019-2022. Il est articulé autour de 4 propositions :

– « Un dispositif de formation professionnalisant »,

– « Une formation à la recherche par la recherche »,

– « Une place pour chacun des acteurs » (l'engagement partenariat devant impliquer les équipes pédagogiques, les usagers de soins et les étudiants),

– « Une promotion du leadership clinique infirmier en Europe » pour renforcer l'identité professionnelle.

« L'université ne nous fait pas rêver, confie Martine Sommelette. Ce qui nous importe c'est que la science infirmière et la recherche soient développées, et cela doit se faire avec l'université. L'IFSI de son côté doit être intégré de manière fonctionnelle, garder la main sur l'ingénierie pédagogique et conserver sa mission d'accompagnement des étudiants qui est essentielle. »

Un regain d'intérêt pour la profession ?

« Depuis l'intégration des formations infirmières à Parcoursup, nous constatons un fort engouement pour les métiers d'infirmier et surtout d'aide-soignant. Il semble que la plateforme leur offre une meilleure visibilité, qui se traduit par une augmentation de leur attractivité.

La possibilité de se former en pratique avancée avec un grade master et de devenir docteur en sciences infirmières offre de nouvelles opportunités qui sont favorables à une meilleure attractivité de la profession infirmière auprès des jeunes générations. »

À noter que le CEFIEC a produit « Passion infirmière », un court métrage de 20 minutes donnant la parole aux infirmiers pour parler de leur métier dans différents lieux d'activité. Ce film, produit en juin 2019, est accessible sur la chaine Youtube du CEFIEC.

Les 75es Journées nationales du CEFIEC auront lieu à Lyon, du 3 au 5 juin en 2020 sur le thème « e-santé et interprofessionnalité, un défi à relever pour les formations en santé ».