OBJECTIF SOINS n° 0282 du 02/09/2021

 

Société

ACTUALITÉS

Anne-Lise Favier  

Les conditions de la fin de vie et l’euthanasie suscitent un débat qui continue de cristalliser les tensions dans le monde de la santé et dans la société. Les Sages de l’Académie de médecine, impliqués de longue date sur ce thème, se sont récemment questionné sur la nécessité – ou non – d’aller plus loin que les dispositions actuelles.

Dans un avis publié le 30 juin 2021*, l'Académie de médecine note que deux propositions de lois ont été présentées récemment par les parlementaires portant sur l’aide active à mourir (notamment le texte N°131 présenté au Sénat et le N°3755 déposé à l’Assemblée nationale). Ces deux documents concernent d'une part le suicide assisté, acte dans lequel un patient s’auto-administre un produit mortel prescrit par un médecin en raison d’une fin de vie proche ou d’une maladie incurable, et l’euthanasie d'autre part, qui concerne la demande d’un patient à un médecin de pratiquer un acte létal.

Mieux connaître le dispositif existant

Ces questions ne sont pas nouvelles et restent au cœur des discussions depuis que la loi Claeys-Leonetti du 2 février 2016 sur la fin de vie a créé les contours d’une fin de vie digne et du meilleur apaisement possible de la souffrance. Pour autant, l’Académie de médecine rappelle « qu'il n’est pas dans la mission du médecin de donner la mort, et que l’on ne peut occulter la réelle souffrance des soignants de passer du soin à l’aide active à mourir ». Elle regrette que, plus de 5 ans après cette loi, les professionnels de santé ne connaissent pas suffisamment cette loi, tout comme la population dans son ensemble. De plus, « en pratique, il perdure une grande inégalité dans l’accès aux soins palliatifs de fin de vie », déplore-t-elle.

Aussi, l'Académie affirme que : « Un nouveau dispositif législatif ne saurait être adopté alors que la formation et l’offre de soins actuelles sont encore loin d’être pleinement mises en œuvre pour répondre aux besoins et aux inquiétudes des citoyens ». Pour avancer sur le sujet, elle réclame donc une formation approfondie sur la fin de vie pour tous les professionnels de santé, notamment sur la pratique des soins palliatifs et les modalités de sédation profonde et continue, un des piliers de la loi de 2016. Dans le même temps, elle estime qu’une information objective et détaillée sur la législation en vigueur est nécessaire pour le grand public, pour que « chacun puisse connaître ses droits actuels dans le domaine de la fin de vie et exprimer ses volontés à ce sujet ».

Poursuivre les travaux

Enfin, l’Académie met en avant la nécessité d’une évaluation de l’application des dispositions actuelles pour voir si elles couvrent bien l’ensemble des situations de fin de vie. Plusieurs affaires médiatisées de personnes ayant eu recours à un suicide assisté à l’étranger, ou d’actes d’euthanasie cachée, remettent régulièrement le débat sur la scène publique. De son côté, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a mis en place un groupe de travail sur la question : « Les États généraux de la bioéthique de 2018 ont abouti au constat qu’en France, on meurt mal et qu’il est nécessaire de progresser pour que l’offre de soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de vie soit optimisée », estime-t-il. Animé par Régis Aubry, Alain Claeys et Florence Gruat, ses premières conclusions sont attendues pour la fin de cette année. Il y a fort à parier que c’est un sujet de société dont vont s’emparer les futurs candidats à l’élection présidentielle, même s’il reste délicat et trouve des défenseurs de chaque point de vue.