OBJECTIF SOINS n° 0282 du 02/09/2021

 

Droits des patients

ACTUALITÉS

Anne-Lise Favier  

Consacré par la loi du 4 mars 2002 sur le droit des malades et la qualité du système de santé, le consentement éclairé aux soins bénéficie d’un cadre juridique précisé dans un article du Code de Santé publique et d’une ordonnance datée de 2020. Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a publié un nouvel avis à ce sujet en juillet dernier.

Droit inaliénable, le consentement de la personne aux soins qui lui sont prodigués est une liberté fondamentale qui doit rester une priorité en toutes circonstances, quels que soient le patient, la pathologie ou le statut de celui-ci. Pour autant, cette définition a posé question au CCNE qui a estimé que l’évolution de la médecine, des traitements, des examens, des analyses, interrogeait sa pertinence : « Comment consentir à quelque chose que l’on ne comprend pas, ou imparfaitement ? Dans quelle mesure le consentement est-il compatible avec les états de grande vulnérabilité ? Comment décider pour autrui, dont la capacité à consentir est altérée ? »

Un dispositif non figé

Pour le CCNE, la notion de consentement ne peut plus être binaire et doit être nuancée. Il estime ainsi que « Le consentement doit être considéré comme un processus évolutif et dynamique, qui ne se donne pas une fois pour toutes, mais s’élabore et peut évoluer dans le cadre d’une relation de confiance réciproque ». À cet égard, il émet une série de recommandations à l’usage des professionnels afin que ce consentement ne reste pas figé. Le CCNE rappelle que le consentement doit être conçu comme un dispositif « facilitant le cheminement de la personne et incluant de possibles rétractations ». Il souhaite ainsi que « la formation initiale et continue des professionnels de santé et du social à l’information et à la communication, pour contribuer à l’effectivité du consentement », soit renforcée. Divers outils peuvent être mis à disposition pour le recueil du consentement : « solliciter l’avis d’une personne extérieure et de nouveaux supports et outils d’information, recourir au numérique pour aider à l’expression et à la mémoire du processus de consentement » sont des pistes pour le favoriser.

Consentement ou assentiment

Dans cette quête du recueil du consentement, le CCNE tient à apporter une nuance : « Lorsque le consentement n’est plus tout à fait possible, peuvent demeurer d’autres formes d’expression plus subtiles, moins formelles, d’une certaine volonté. Alors, la recherche de l’assentiment est essentielle chez les personnes qui sont dans l’incapacité partielle ou totale de consentir. Les soignants doivent ainsi apprendre à reconnaître, observer, décrire, interpréter, respecter l’assentiment d’un patient, et lui accorder une réelle valeur, indiscutable et contraignante dans la relation de soin pour le respect de l’autonomie de la personne accompagnée ou soignée ». Cet assentiment n’est pas, comme le consentement, une officialisation juridique, il « n’use pas nécessairement de mots, encore moins de formules, mais il use toujours de signes. Incliner la tête, esquisser un sourire, faire un geste d’accueil même momentané,  est signe d’assentiment. Il suffit parfois d’un instant de conscience, d’un regard, d’un éclair de vigilance. À l’inverse, le visage crispé, le regard détourné, diront mieux le refus qu’une signature arrachée au malade capable », comme le rappelle l’espace Ethique d’Ile-de-France*.

Fait nouveau, le CCNE recommande de classer comme un acte de soin le fait de « reconnaître et valoriser l’information et l’aide à l’élaboration du consentement ». Il estime qu’une formation renforcée sur ces questions, une reconnaissance pleine et entière de l’information et du processus d’aide au cheminement des personnes soignées, devraient contribuer à un recours plus fréquent aux directives anticipées que la loi recommande à tout citoyen de rédiger.

La question de la personne de confiance réside également au centre de cette réflexion pour les personnes qui n’ont pas, ou plus, la faculté de décision : pour cela, le CCNE estime qu’il faut davantage la sensibiliser sur son rôle et valoriser des formes de directives anticipées non réduites à l’écrit. Le CCNE appelle de ses vœux la mise en place d’actions à destination du grand public telles que la sensibilisation des citoyens, à tous les âges de la vie, aux enjeux éthiques et juridiques du consentement (notamment via les Espaces régionaux de réflexion éthique) ou l’organisation d’une Journée nationale dédiée aux personnes de confiance.

Une réflexion à poursuivre

Ces recommandations n’ont pas été spécifiquement émises à la suite de la crise sanitaire liée au Covid-19, puisque la réflexion était entamée en amont, mais le CCNE admet que le contexte sanitaire exceptionnel a sans doute exacerbé la nécessité de la réflexion. Bien des questions se sont en effet posées pendant cette crise, ne serait-ce que que concernant le consentement des personnes âgées à la vaccination. Nul doute que cette réflexion doit se poursuivre en lien avec l’évolution de l’horizon médical, de plus en plus complexe.