OBJECTIF SOINS n° 0285 du 10/02/2022

 

ACTUALITÉS

Réalisée par Claire Pourprix

  

Éthique et covid

« Serait-il éthique de prioriser en réanimation les malades Covid-19 vaccinés ? » Emmanuel Hirsch, professeur d'éthique médicale à l’Université Paris-Saclay, pose la question. « Selon quels principes intangibles ériger des critères décisionnels pertinents, éthiquement soutenables, alors que tant de facteurs, notamment d’ordre socioculturel, infèrent dans l’exposition différenciée aux risques en ce qui concerne notre santé ? La participation à la solidarité vaccinale ne pourrait-elle pas toutefois constituer un critère d’arbitrage recevable entre deux malades présentant des indications équivalentes à la réanimation ? » Il rappelle les recommandations de la Société française d’anesthésie et réanimation (SFAR) en matière de conditions d’arbitrage, basées exclusivement sur des critères médicaux. Aucune preuve, à ce jour, ne permettant d’estimer qu’un patient non vacciné aurait moins de chance qu’un vacciné de survivre, le critère de décision sortirait donc du cadre médical et serait discriminatoire. Au vu de la complexité du débat – par exemple, en quoi est-il éthique de penser qu’une intervention déprogrammée a des conséquences vitales moindres que la prise en charge des malades du Covid ? –, Emmanuel Hirsh plaide pour « une concertation argumentée portant sur les critères d’acceptabilité des décisions qui concernent les valeurs dont nous devons être collectivement les garants ». « Il nous faudra peut-être aborder dignement, dans la rigueur et la transparence d’arbitrages pertinents et justes, la nécessité de choix de priorisation en réanimation intégrant des critères non exclusivement d’ordre médical. N’est-il pas préférable d’anticiper cette éventualité, plutôt que de concéder à une forme d’indifférence ou de tolérance à des pratiques qui devraient elles aussi mobiliser notre attention ? »

L’art d’évoquer le sida

France culture diffuse « Quand la création raconte le sida », une série documentaire en 4 épisodes. Le premier, « Dire sa vie et sa mort », évoque la manière dont, de manière inédite, des personnes atteintes du sida ont témoigné de leur maladie dans des œuvres, de manière très intime, tout en revendiquant leur « refus de la fatalité ». Le deuxième, « Corps souffrants, corps combattants » traite de la représentation des corps des patients au sein d’une société qui « a tendance à détourner les yeux » des personnes atteintes du sida. « Traiter les traitements », l’épisode 3, montre l’évolution de l’image du sida et des personnes séropositives avec l’arrivée des trithérapies. Enfin, « Hanter les survivants » s’intéresse au travail de mémoire des artistes survivants au travers d’œuvres permettant de faire un travail de « deuil individuel et collectif ».

L’incitation financière en santé publique

Lorsque Karine Lacombe, chef du service des maladies infectieuses de l'hôpital Saint-Antoine à Paris, évoque l’idée d’une récompense financière pour inciter les personnes à se faire vacciner contre la Covid, elle soulève un tollé… Pourtant, la Grèce et New York ont versé des primes aux récalcitrants et cette pratique a montré son efficacité en France, dans le domaine des addictions notamment. D’autres expérimentations sont en cours, auprès de femmes en situation de précarité, pour les inciter à suivre les consultations de grossesse ou augmenter le dépistage du cancer du col de l'utérus.

  • Le Figaro, 3 janvier 2022