OBJECTIF SOINS n° 0287 du 07/07/2022

 

Politique de santé

ACTUALITÉS

Claire Pourprix

  

L’Institut Montaigne a publié en mai dernier un rapport intitulé « Santé : faire le pari des territoires », dans lequel il formule 15 propositions pour refondre notre gouvernance du système de soin. L’enjeu : décentraliser les décisions pour que les acteurs locaux puissent agir afin d’améliorer l’accès aux soins et innover. Son travail s’appuie sur des auditions d’acteurs du secteur et une cartographie interactive pointant les décalages entre les besoins et les dépenses de santé sur les territoires.

Complexité de l’organisation du système de santé, sentiment de perte de sens ressenti par les professionnels, difficultés à innover localement, manque d’espace de liberté pour une meilleure interaction entre les acteurs privés et les collectivités territoriales… Autant de freins à l’efficacité et à la qualité de notre système de soins, d’après le dernier rapport de l’Institut Montaigne « Santé : faire le pari des territoires »*. Pour les membres de ce think tank, il est « urgent de donner aux territoires des leviers d’action concrets sur l’organisation des soins primaires, la prévention, le déploiement des innovations, etc. pour améliorer l'accès aux soins et inventer les parcours santé de demain », sans pour autant renier le cadre commun des politiques de santé décidées au plan national.

L’Institut Montaigne a réalisé une cartographie inédite sur la base de données démographiques, socio-économiques et épidémiologiques, et regroupé les départements français en sept groupes homogènes en termes de besoins de santé : bien-portants, désavantagés, dynamiques, enclavés, ruraux, ultramarins et vulnérables. Pour chacun d’entre eux, il a calculé la dépense totale de santé par an par habitant. Résultat : il existe des disparités importantes au sein d’un même groupe. Par exemple, pour le groupe ultramarins, la dépense annuelle s’élève à 662 euros à Mayotte contre 2 573 euros en Guadeloupe, à comparer avec une moyenne de 2 108 euros en France.

Pour y remédier, le think tank préconise dans un premier axe d’accorder aux acteurs de terrain (élus, professionnels de santé et citoyens…) l'autonomie et la liberté nécessaires à leur action. Cela passe entre autres par la refonte de la « formation des professionnels de santé au début comme au cours de leur carrière pour favoriser l'approche globale de la santé ; former à la gestion de l'innovation et accentuer la dimension managériale ». Un deuxième axe de propositions vise à « soutenir les territoires comme pilotes des politiques de santé ». Cela repose en particulier sur une plus forte implication des patients localement, alors que seuls 40 % des Français pensent que le système de santé est pensé pour et avec les patients. Enfin, le troisième axe de propositions  vise à « faire de la France une nation de santé publique », capable d'anticiper les défis de demain. L’Institut Montaigne souligne que l’espérance de vie sans incapacité en France est très moyenne (64,5 ans pour les femmes et 63 ans pour les hommes), en raison en particulier du manque d’une approche de santé globale combinant la santé humaine, animale et environnementale, qui soit intégrée au sein de l'ensemble des politiques publiques (logement, éducation, environnement…). L’ensemble du rapport ainsi que la cartographie interactive sont disponibles en ligne*.

Une cartographie interactive instructive

La cartographie de la France permet de comparer les dépenses de santé par département et de visualiser, au sein des sept groupes de départements homogènes identifiés, les écarts de dépense de santé par an et par habitant. Elle offre aussi la possibilité d’aller plus dans le détail, avec des données sur le ratio population urbaine/population rurale, le taux de maladies chroniques, psychiatriques, de maternité, la part des décès imputables à l’alcool, le taux de chômage, le revenu annuel médian et la part de la population de 75 ans ou plus, etc.