OBJECTIF SOINS n° 0288 du 31/08/2022

 

Crise sanitaire

ACTUALITÉS

Anne Lise Favier

  

Dans un document de travail, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) fait état de la soutenabilité et résilience du système de santé français. Il qualifie ainsi les forces et faiblesses de ce système pour ensuite édicter quelques pistes d’amélioration.

La soutenabilité et la résilience sont des notions complexes, encore plus lorsqu’elles sont appliquées au système de santé. Dans une note de travail* publiée en juin 2022, l’IRDES les qualifie comme suit :  la soutenabilité est « la capacité d’un système de santé à maintenir ses fonctions essentielles – offre de services, approvisionnement en ressources humaines et matérielles, financement et gestion – tout en intégrant les principes de financement équitable, d’équité et d’efficacité dans l’objectif d’améliorer la santé des populations et de couvrir les besoins » ; la résilience est, quant à elle, « la capacité à se préparer, à gérer et à tirer des enseignements des crises nées des chocs à court terme et de stress cumulés, afin de minimiser leur impact négatif sur la santé de la population et les perturbations des services de santé ». Deux définitions lourdes de sens dans une période où l’on ne cesse de s’interroger sur un système de santé au bord du gouffre. Cette étude éclaire tous les aspects du système de santé au cours de la crise sanitaire due au Covid-19 : sa gouvernance, son financement, la gestion de ses ressources humaines, son approvisionnement en médicaments et technologies et enfin, son organisation de l’offre de soins.

Des atouts et des lacunes

L’IRDES estime ainsi que les institutions nationales ont plutôt bien fonctionné, avec une réponse centralisée rapide, notamment en termes de législation d’urgence. Il estime également que le financement du système de santé, relativement flexible, a permis le maintien d’une couverture universelle pour tous et l’injection de fonds là où il le fallait et quand cela nécessaire. Concernant les ressources humaines, l’IRDES qualifie le nombre élevé de professionnels de santé comme un atout et relève la flexibilité dans le développement de solutions alternatives pour les patients pendant la crise (télé-consultation, mobilisation des réseaux de soins). Autre atout, une évaluation des médicaments et des technologies de santé relativement rapide qui a permis de mettre en place efficacement des solutions palliatives aux pénuries de médicaments ou de dispositifs de santé. Le dernier point positif concerne l’offre de soins : le large choix de fournisseurs de soins existant a permis une certaine résilience, tout comme la montée en puissance de la capacité hospitalière.

Néanmoins, ces points positifs ne cachent pas les dysfonctionnements et lacunes du système de santé. En effet, la centralisation, tantôt saluée par le document de travail, entraîne trop de bureaucratie et produit un manque de coordination qui induit des faiblesses au niveau local. La gestion globale des soins demeure trop compartimentée avec une offre de soins fragmentée et peu de collaborations entre les différents acteurs. Last but not least, l’absence de souveraineté en matière de produits de santé peut être préjudiciable en temps de crise et ce, d’autant plus que la bureaucratie ralentit encore les initiatives pour y faire face.

Des pistes pour mieux faire

Pour faire face en cas de nouvelle crise, l’IRDES met en perspective les idées suivantes. Avant toute chose, penser à un plan Pandémie qui définisse le rôle de chacun et améliore le dialogue entre les instances centrales et locales. Il préconise plus de latitude financière au niveau régional pour développer des politiques ciblées selon les besoins et une réforme de la T2A, incluant notamment une prise en compte de l’éducation thérapeutique et la coordination des soins. Sur la question des ressources humaines, le constat reste orienté vers la coopération et la flexibilité dans l’offre de soins par une rémunération appropriée et des perspectives de carrière pour tous, ainsi que vers une réforme des cursus universitaires pour introduire des formations pluridisciplinaires ; l’IRDES insiste également sur l’importance du rôle des infirmiers. Sur l’approvisionnement des médicaments, l’IRDES propose de développer des solutions pour assurer leur disponibilité et renforcer la capacité d’évaluation des technologies de santé pour mieux assurer leur diffusion, et augmenter les fonds publics alloués à la recherche en santé. Enfin, il suggère d’établir une liste des services de santé prioritaires à protéger et maintenir si une nouvelle crise devait voir le jour.