En France, une personne retraitée passe les trois quarts de sa retraite sans être en bonne santé : « Certes, on vit longtemps dans notre pays, mais qu’est-ce que c’est long ! L’espérance de vie en bonne santé ne dépasse pas les 65 ans. C’est un fait, on vieillit mal en France et bien souvent, on s’en rend compte à un âge avancé », constate le Dr Éric Boulanger, praticien hospitalier de gériatrie au CHRU de Lille. C’est d’autant plus vrai dans la région des Hauts-de-France, où l’espérance de vie constatée est la plus basse : 83,1 ans pour les femmes (contre une moyenne de 86 au niveau national) et 76,6 ans pour les hommes (80 ans au niveau national).
Pour accompagner ce vieillissement et faire en sorte qu’il soit vécu dans des conditions favorables, les CHU de Lille et d’Amiens-Picardie se sont adjoint les services de l’Institut des rencontres de la forme (IRFO) et de l'entreprise Kelindi pour créer Tempoforme, un programme de prévention santé qui vise le bien vieillir en repérant les pré-fragilités et fragilités de la population des Hauts-de-France. « Le monde médical ne s’approprie pas la prévention, parce qu’il y a une méconnaissance de ce qu’est une personne âgée hors du parcours spécialisé. Par ailleurs, le citoyen ne doit pas non plus banaliser ses troubles du vieillissement et se dire « C’est normal à mon âge ». Nous sommes tous acteurs de notre bien vieillir. Et c’est à ça que sert Tempoforme, à assurer un vieillissement de qualité et à faire en sorte que les organes vieillissent de manière physiologique, sans maladie », résume le Pr Frédéric Bloch, chef de service gériatrie au CHU d’Amiens.
Un programme, cinq outils
Bâti sur l’expertise médicale et scientifique des CHU nordistes, des compétences technologiques de Kelendi et du savoir-faire en matière de prévention de l’IRFO, ce programme est doté de cinq outils complémentaires : une application, une plateforme web, une formation universitaire diplômante, un réseau d’ambassadeurs et un espace « Bien vieillir » situé sur le campus du CHU de Lille. L’application, gratuite, consiste en une auto-évaluation de la (pré)fragilité. Elle permet notamment de repérer une diminution de certaines capacités, en analysant sept domaines : les capacités physiques, la vitalité, la perception de la vie, le raisonnement, la mémoire, la vie sociale et le capital sensoriel. « Ces notions sont autant de paramètres qui influent sur le bien-être et donc sur la manière de vieillir, c’est pour cette raison qu’ils ont été intégrés à Tempoforme », explique Florian Le Goff, dirigeant de Kelindi.
Repérer les fragilités et prioriser
Une fois ces paramètres analysés sur l’application, ils permettent, si besoin, une orientation vers le médecin traitant ou l’espace Tempoforme situé au CHU lillois. La plateforme web a les mêmes visées que l’application et permet en outre aux professionnels de santé de s’inscrire à des sessions de formation et d’information ; c’est également un centre de ressources pour la population, avec des indicateurs de suivi et des conseils pratiques. Pour les professionnels et étudiants du champ sanitaire et social, une formation diplômante de onze heures (dont huit en e-learning) est dispensée par la faculté des sciences de la santé et du sport de l’université de Lille pour mieux appréhender le « bien vieillir ». Last but not least, le dispositif Tempoforme s’accompagne d’un lieu de prise en charge, situé au CHU de Lille, dans lequel les personnes ayant été repérées comme fragiles selon les critères évalués dans le programme peuvent bénéficier d’une prise en charge, avec trois niveaux d’accompagnement, une téléexpertise, une téléconsultation avec un expert du vieillissement et enfin un bilan de deux heures assorti de recommandations priorisées : « Il est logique de proposer à quelqu’un qui a une baisse d’audition de se faire appareiller, car c’est vraiment un facteur d’isolement pour le patient. C’est un élément à prioriser, par exemple, par rapport à une perte de poids », explique le Dr Éric Boulanger. Et de conclure : « Tempoforme est une démarche unique en France qui permet de repérer les pré-fragilités et d’œuvrer pour un vieillissement en bonne santé ». Un enjeu de taille quand on sait que, d’ici 2050, plus d’un tiers de la population française sera âgée de plus de 60 ans.
Plus d’informations sur https://www.tempoforme.org/