À l’occasion du remaniement du gouvernement intervenu le 20 juillet 2023, Aurélien Rousseau a succédé à François Braun au poste de ministre de la Santé et de la Prévention. L’ancien chef de cabinet de la Première ministre hérite de dossiers complexes dans un secteur de la santé toujours en tension.
À peine arrivé dans les bureaux du ministère de la Santé, une suspicion de conflits d’intérêts s’est installée. La prise de poste d’Aurélien Rousseau était-elle compatible avec la fonction de sa conjointe, Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée de la Caisse nationale d’assurance maladie ? Le nouveau ministre a saisi la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATV), qui a tranché par la négative. Dans un communiqué du 25 juillet 2023, celle-ci écrit que « La fonction de la conjointe du ministre n’est pas, en elle-même, de nature à constituer une situation de conflit d’intérêts ». Et, pour éviter tout risque, Aurélien Rousseau « se déportera sur toute décision concernant directement ou indirectement la situation professionnelle de sa conjointe » selon un décret de report qu’il a lui-même sollicité.
Contrairement à son prédécesseur, urgentiste de métier et peu rompu à l’exercice de la politique, Aurélien Rousseau connaît bien les arcanes du pouvoir. Ancien professeur d’histoire-géographie, passé par les bancs de l’ENA, il a fait ses classes en politique à la mairie de Paris avant d’être nommé directeur adjoint du cabinet et conseiller social des Premiers ministres Manuel Valls puis Bernard Cazeneuve de 2015 à 2017, et enfin directeur du cabinet de la Première ministre, Élisabeth Borne, de mai 2022 au 13 juillet dernier. Ce haut fonctionnaire, âgé de 47 ans, n’est pas pour autant novice dans le domaine de la santé puisqu’il a dirigé l’agence régionale de santé (ARS) Île-de-France entre 2018 et 2021, en pleine crise sanitaire.
Lors de la passation de pouvoir entre les deux ministres, François Braun a déclaré : « Malgré les crises de l’été 2022, du Monkeypox, de la triple épidémie hivernale, des pénuries de médicaments, nous avons réussi à faire évoluer les mentalités vers un système de santé rénové et développé l’ébauche d’une culture de la prévention. Réussi à initier ce changement de paradigme, qui passe d’un système basé sur l’offre de soins à un système basé sur la réponse aux besoins de santé de nos concitoyens ». Pour autant, si des avancées ont été réalisées durant son année au ministère – il a par exemple cité le CNR [Conseil national de la refondation] santé, la régulation médicale préalable à l’arrivée aux urgences, la généralisation du service d’accès aux soins, la lutte contre les dérives de l’intérim médical, le début de la reconnaissance de la pénibilité du travail de nuit à l’hôpital… – de nombreux problèmes persistent. En témoignent les grèves à répétition des médecins, en ville comme à l’hôpital, la pénurie alarmante de médicaments, le manque d’effectifs de personnels soignants…
François Braun dit avoir « trouvé en arrivant un système de santé à bout de souffle, exsangue après deux années de crise sanitaire et des décennies de sous-investissement y compris et surtout politique, alors même que la santé est la préoccupation principale de nos concitoyens ». Aurélien Rousseau, pour sa part, a déclaré ressentir une émotion de « gravité, au moment de prendre la tête de ce ministère des crises, les crises du quotidien (…) mais aussi parce que le monde de la santé, depuis plusieurs années maintenant, traverse des crises au-delà du covid, qu’il y a urgence à donner à voir du concret, urgence à voir les changements pour les soignants, pour les soignés dans les services, dans les cabinets médicaux. Ça n’est pas simplement la crise du court terme, ce n’est pas un ministère où les crises se succèdent juste sur le point de vue sanitaire, c’est aussi un ministère qui pilote et qui doit apporter des réponses à tout un monde qui réclame avec justesse du sens. »
Sur le terrain, les attentes sont d’ailleurs nombreuses. Le nouveau ministre aura à gérer plusieurs dossiers brulants dès la rentrée. À commencer par la crise de l’hôpital, responsable d’une dégradation de l’offre de soins. La lutte contre les déserts médicaux, l’amélioration de l’accès aux soins, la refonte du système psychiatrique, la réingénierie des formations paramédicales infirmières et cadres de santé ou encore un projet de loi sur la fin de vie sont également à l’ordre du jour. Après Agnès Buzyn, Olivier Véran, Brigitte Bourguignon (quelques jours), et François Braun, Aurélien Rousseau est le cinquième ministre de la Santé sous la présidence d’Emmanuel Macron. Parviendra-t-il à relever tous les défis ?