OBJECTIF SOINS n° 0297 du 01/02/2024

 

Haute Autorité de santé

ACTUALITÉS

Anne Lise Favier

  

Dans un avis paru début décembre 2023, la Haute Autorité de santé (HAS) entérine la reconnaissance institutionnelle de l’engagement et de la participation des usagers. Cette décision fait suite à la stratégie nationale de santé en cours qui prévoit que soit laissée une place importante aux usagers et à leurs représentants dans leurs parcours de soins et la gouvernance du système de santé.

La HAS rappelle que les deux dernières décennies du XXe siècle ont été marquées par de conséquentes mobilisations d’associations d’usagers et des actions judiciaires retentissantes qui ont montré l’implication de ceux-ci dans le système de santé, à l’image des scandales sanitaires qui ont émaillé les « années Sida ». Les États généraux de la santé de 1998 et 1999 ont d’ailleurs abouti à d’importants ajustements législatifs à plusieurs reprises jusqu’en 2002 (et la « loi Kouchner » sur les droits des malades) concrétisant ce que l’on appelle la démocratie sanitaire. Cette dernière est une démarche qui associe l’ensemble des acteurs du système de santé dans l’élaboration et la mise en œuvre de la politique de santé. Elle repose sur le droit individuel des personnes (accès au dossier médical, recueil du consentement, droit au projet personnalisé), le droit collectif (représentation des usagers dans les commissions, action de groupe) et la conduite d’actions de renforcement des capacités des usagers par la mise en place de services publics (information, éducation, accompagnement…). La HAS estime que « La dissymétrie des positions entre professionnels de santé et usagers a pu être réduite, mais reste cependant massive au point d’appeler de nouvelles évolutions » : l’occasion de relancer une dynamique se présente donc avec la préparation de la stratégie nationale de santé 2023-33.

Quatre leviers de renfort

La Haute Autorité identifie ainsi quatre leviers pour y parvenir.

Le premier concerne la promotion de l’engagement et de la participation des usagers auprès des professionnels de santé : « initiée dans toutes ses composantes, elle ne peut aller sans une prise de conscience et une évolution profonde des professionnels de santé, leur sensibilisation et leur formation à toutes les étapes de leur cursus, de la formation initiale à la formation continue ».

La HAS estime que « les dimensions d’écoute, de reconnaissance de l’expérience et de l’expertise des patients, de partage décisionnel, notamment, ne “vont pas de soi” », rappelant qu’elles doivent être nommées et reconnues comme « éléments à définir et développer ». Le second point sur lequel la HAS insiste est « l’effectivité des droits individuels » reconnus notamment par les lois de 2002 (celle du 2 janvier rénovant l’action sociale et médicosociale et celle du 4 mars sur les droits des malades), mais pour lesquels des saisines en justice ont montré que certaines situations faisaient encore l’objet d’interrogations. Aussi, « La HAS plaide pour que les contrôles soient plus denses et que les autorités publiques indépendantes chargées de la veille voient leurs capacités renforcées pour faire respecter les droits ». Troisième point, la représentation des usagers par des associations agréées : la HAS note que celle-ci est parfois mise à mal dans certaines instances, et qu’il faut donc mener une réflexion sur les aménagements à prévoir pour qu’elle soit meilleure : « Le nombre d’associations bénéficiant de l’agrément de représentation des usagers marque le pas au point que les établissements et institutions publiques peinent à trouver des personnes en situation de siéger dans les instances mises en place », s’inquiète la HAS.

Dernier et quatrième point, les actions de renforcement des capacités des usagers : cela concerne notamment les actions conduites au titre de l’accompagnement en santé, qui demeurent parfois difficiles d’accès, malgré une inscription dans l’article 92 de la loi de modernisation du système de santé. La HAS appelle de ses vœux une clarification et un soutien à la hauteur des besoins réels d’une politique nationale d’accompagnement en santé. Cette dynamique encouragera la France à conserver son avance dans ce domaine, elle qui s’est inscrite très tôt dans une stratégie de démocratie sanitaire mais semble s’être un peu essoufflée ces dernières années.

Conditions pour un avenir radieux

Des résolutions sur lesquelles la HAS souhaite s’appuyer afin de préparer la stratégie nationale de santé pour la prochaine décennie, qui devra faire face à trois grands défis : le vieillissement de la population, la réduction des inégalités et la préparation aux changements écologiques et aux crises.