Après de longues semaines d’attente, le nom du ministre délégué à la Santé et à la Prévention a été dévoilé le 8 février dernier. Le gouvernement a fait le choix de nommer Frédéric Valletoux (57 ans), une annonce saluée par le monde hospitalier public mais vivement critiquée par les médecins libéraux.
Après des études d’histoire et une première carrière comme journaliste aux Échos, rédacteur en chef de La Gazette des communes puis directeur délégué en charge des développements éditoriaux au sein du groupe Moniteur, Frédéric Valletoux a embrassé la vie publique en 2005. Élu maire de Fontainebleau (Seine-et-Marne) de 2005 à 2022 et conseiller régional d'Ile-de-France de 2010 à 2022, cet homme de droite a pris ses distances avec sa famille politique d’origine. Élu maire sous étiquette UMP, puis Les Républicains, il a intégré le parti Agir en 2019 avant de rejoindre le groupe Horizons en 2021. L’année suivante, il a été élu député est devenu porte-parole d’Horizons à l’Assemblée nationale.
En parallèle, Frédéric Valletoux s’est investi dans le champ de la santé, en assurant la présidence de la Fédération hospitalière de France (FHF) de 2011 à 2022. Cette dernière, fondée en 1924, regroupe la quasi-totalité des établissements publics de santé et a pour mission de défendre et de renforcer le service public de la santé. « Frédéric Valletoux est un élu local, ancré dans son territoire et fin connaisseur des enjeux de santé des Français. Il saura mettre cette expérience au service des attentes concrètes des citoyens et d’un véritable ministère du dernier kilomètre en santé. Il a toute la confiance des hospitaliers pour remplir sa mission », a déclaré Arnaud Robinet, l’actuel président de la FHF.
De son côté, la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a également salué son arrivée au ministère, arguant qu’il « connaît les fortes inquiétudes des acteurs de santé, les fragilités de notre système, et les dossiers urgents qu’il convient de prendre à bras-le-corps ». Lamine Gharbi, son président, a souligné : « Frédéric Valletoux a déclaré récemment : si on veut vraiment que ce système se réforme, il faut des décisions volontaristes et courageuses. Je partage cette vision : il faut une rupture, et la prochaine campagne tarifaire doit être l’incarnation de ce courage, avec des moyens à la hauteur des enjeux de santé, priorité des citoyens. L’autre priorité qui nécessite courage et volonté, c’est la mise en œuvre du Service Public de Santé, pour que nous soyons enfin tous réunis au service des Français et de leur santé. » FHF et FHP seront toutes deux très attentives à obtenir un soutien renforcé du ministère pour pallier les déficits de leurs établissements* (voir page…). Un enjeu parmi d’autres, le monde hospitalier étant en attente de solutions, tant sur le plan de la gestion des urgences, des pénuries de personnel, du manque de moyens et de lits en services de pédiatrie, de psychiatrie… La liste est longue.
Frédéric Valletoux, qui s’est illustré comme député en portant la loi sur l’accès aux soins, votée le 18 décembre 2023, s’est mis à dos nombre de médecins. Sa nomination en pleine période de renégociation du contrat qui lie les médecins libéraux avec l’Assurance-maladie a été fraîchement accueillie. « Qu’importe la « durée de vie » du tout nouveau ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, il ne faudra probablement pas attendre longtemps pour que les médecins (et notamment les jeunes), hospitaliers comme libéraux, soient les victimes collatérales de la nomination de M. Frédéric Valletoux, connu pour ses positions odieuses à leur égard et son soutien aux politiques de santé les plus inefficaces », déclarait ainsi le syndicat Jeunes médecins dans un communiqué le 19 février dernier. Les syndicats de médecins libéraux se sont vivement opposés aux mesures proposées par le nouveau ministre délégué – et qui ont été retirées dans le texte final – qui portaient sur le rattachement automatique des médecins libéraux aux Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) pour inciter les soignants à travailler ensemble et organiser la permanence des soins sur le territoire. Mais leurs griefs sont plus anciens encore, car ils estiment qu’il a toujours tenu les médecins libéraux pour responsables des défaillances du système de santé.
Des tensions sont donc à prévoir, alors que d’autres chantiers d’envergure sont au programme de son ministère : la réforme de l’Aide médicale d’État (AME) ou encore le projet de loi sur la fin de vie. Un sujet épineux pour Frédéric Valletoux, qui s’est publiquement opposé à ce texte lorsqu’il était député.