Pratique hospitalière
DROIT
Avocat à la cour de Lyon
Faute dans la prise en charge psychiatrique, suicide de patients hospitalisés : voici quelques éléments de jurisprudence récente en matière de responsabilité et psychiatrie.
Les établissements dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (CSP, Art. L. 1142-1 I).
Le fait qu’une patiente hospitalisée ait pu être violée à deux reprises de suite par un autre patient révèle des carences graves de la surveillance infirmière, qui engagent la responsabilité civile de l’établissement (TA Marseille, 28 mai 2024, n° 2206081).
Le 12 juillet 2018, une infirmière libérale présentant des antécédents de dépression et d'autolyse, a été accompagnée par les marins-pompiers au service des urgences psychiatriques de l'hôpital de la Conception à Marseille, relevant de l'AP-HM, où elle a été admise en soin libre à 10 h 35 et installée dans une chambre. Le jour même dans la soirée, elle a été victime, dans sa chambre d'hôpital, d'un viol commis par un autre patient, qui s'est présenté à deux reprises dans sa chambre et qui portait une blouse de personnel hospitalier.
Par un arrêt du 15 mars 2021, la Cour d'assises des Bouches-du-Rhône a reconnu le patient concerné coupable de ces faits et l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle, dès lors qu'il se trouvait en état de récidive légale. La victime a saisi le fonds d’indemnisation s’agissant du préjudice consécutif au viol. Ainsi, elle a saisi le tribunal administratif pour être indemnisée du préjudice moral consécutif aux fautes dont elle estime avoir été victime durant sa prise en charge à l'hôpital.
La patiente a été prise en charge le 12 juillet 2018 au sein de l'unité en soins psychiatriques de l'hôpital dans un état de trouble anxio-dépressif caractérisé et elle présentait des antécédents d'autolyse. Ainsi, si elle n'était pas hospitalisée sous contrainte, elle a été accueillie dans un service spécialisé en psychiatrie qui, par ailleurs, avait connaissance de ses antécédents médicaux. Elle a d’ailleurs rapidement été installée dans une chambre, au calme, dans l'attente de l'arrivée du psychiatre. Mais là, elle a été laissée seule durant près de 10 heures, sans voir de médecin, avant que les faits dont elle a été victime ne se produisent. En outre, le personnel médical l'avait laissée en possession de sa ceinture qu'elle a noué autour de son cou dans sa chambre dans le but de s'évanouir pour mettre un terme à son anxiété. Il s’agit là de manquements graves de nature à engager la responsabilité pour faute de l'établissement.
Par ailleurs, il ressort du dossier que l'agresseur de la patiente était connu du service et a également été laissé sans surveillance spécifique, ce qui lui a permis de déambuler dans le service et d'entrer à deux reprises, à 2 heures d'intervalle, dans la chambre voisine de la victime. Alors que l'intéressé l'a agressée une première fois, celle-ci a actionné le bouton d'alarme pour appeler à l'aide le personnel du service.
Toutefois, l'infirmière qui est venue éteindre l'alarme déclenchée par la victime ne lui a pas parlé et ne s'est pas approchée d'elle, alors même que la patiente était allongée sur son lit, nue, le t-shirt relevé jusqu'au nombril et le pantalon et les sous-vêtements baissés jusqu'aux chevilles, et en outre, avait sa ceinture autour du cou. Elle s'est contentée d'éteindre l'alarme et de ressortir de la chambre en fermant la porte à clé de l'extérieur sans se rendre compte que son agresseur s'était dissimulé dans la salle de bain. Ce n'est que lorsque la patiente a déclenché à nouveau l'alarme quelques minutes plus tard, alors que son agresseur venait de la violer à nouveau, que cette même infirmière accompagnée d'un second infirmier sont intervenus pour la secourir et la prendre en charge.
Dans ces conditions, en laissant ainsi l'agresseur, également patient du service, sans surveillance, lui permettant d'entrer dans la chambre de la victime et de la violer, puis en ne s'apercevant pas de l'anormalité de la situation alors que la victime malgré son état avait réussi à actionner le bouton d'alarme, l'AP-HM a commis une nouvelle série de manquements graves de nature à engager la responsabilité pour faute de l'établissement. Le tribunal a alloué une somme de 15 000 € au titre du préjudice moral.
Enfin, la patiente soutient qu'elle n'a pas été correctement prise en charge après les faits de viol dont elle a été victime au sein de l'unité en soins psychiatriques où elle était hospitalisée. À l’examen, ce grief n’a pas été retenu. La patiente a été immédiatement examinée par le médecin légiste, les forces de l'ordre ont été contactées, son agresseur a été neutralisé et, alors qu'elle tentait à nouveau de s'étrangler avec sa ceinture, puis avec le cordon d'un saturomètre, l'équipe médicale a pris la décision de la sédater, de la contentionner et de la placer à l'isolement. Elle a été par la suite étroitement surveillée afin d'éviter qu'elle ne porte atteinte à son intégrité physique jusqu'à sa sortie de l'unité le 16 juillet 2018. Par suite, la preuve des manquements fautifs de l’AP-HM sur ce volet ne sont pas prouvés.
L’agression mortelle par un patient ne révèle pas de faute de l’hôpital dès lors que le risque de passage à l’acte chez le patient agresseur n’avait rien de prévisible (CAA Versailles, 7 mai 2024, n° 20VE02953).
Une patiente, mariée et mère de famille, souffrant de bipolarité, a été hospitalisée sous contrainte le 31 mai 2016 en milieu spécialisé et placée dans le secteur fermé du service de psychiatrie. Dans la nuit du 31 mai au 1er juin, elle a été agressée mortellement par la patiente avec laquelle elle partageait la chambre. Le 3 juin, elle est décédée des suites de cette agression.
La patiente a intégré le secteur fermé dans la journée du 31 mai 2016. Vers 19 heures, après une crise hallucinatoire au cours de laquelle elle a donné deux coups violents dans une porte, une autre patiente nouvellement arrivée a reçu deux ampoules de Loxapac® et une de Valium® afin de la calmer. Elle a été placée dans la chambre de la patiente, seule chambre double du service. Elle souffrait d'hallucinations à tendances suicidaires mais sans aucun antécédent d'agressivité à l'égard d'autrui et elle était hospitalisée à sa demande le même jour à la suite d'une tentative de suicide la veille.
Son comportement meurtrier n'était en rien prévisible compte tenu de ses antécédents pathologiques et des sédatifs reçus. Le secteur fermé ne disposait que de huit chambres simples et d'une chambre double. Dans ces conditions, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre du groupe hospitalier du fait d'avoir placé les deux patientes dans la même chambre.
Des rondes étaient organisées toutes les deux heures. Lors de la ronde de 22 h, la patiente sédatée semblait calme. Dès lors que son comportement agressif ultérieur n'était pas prévisible, aucun défaut de surveillance ne peut être reproché à l’équipe hospitalière. Ainsi, compte tenu de l'absence du caractère effectivement prévisible de l'agression nocturne d'une patiente, et de l'absence de chambre simple disponible, l'agression subie, aussi effroyable soit-elle, ne révèle pas en elle-même une faute du groupe hospitalier dans l'organisation et le fonctionnement du service.
La limitation excessive du droit de visite par un établissement de santé est une faute qui engage sa responsabilité (CAA Paris, 29 avril 2024, n° 23PA00867).
Pendant la pandémie de Covid-19, la direction a décidé de suspendre temporairement les visites dans un service de psychiatrie en raison de la présence d'un « cluster », afin d'endiguer la propagation du virus et de protéger les patients et le personnel soignant. Des frères et sœurs ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision qui les avait empêchés de visiter leur mère, qui y était hospitalisée d'office.
Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux est hospitalisée sans son consentement, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et à la mise en œuvre de son traitement (CSP, Art. 3211-3). Le directeur, président du directoire, conduit la politique générale de l'établissement (CSP, Art. L. 6143-7). Les visiteurs ne doivent pas troubler le repos des malades ni gêner le fonctionnement des services. Lorsque cette obligation n'est pas respectée, l'expulsion du visiteur et l'interdiction de visite peuvent être décidées par le directeur. Les patients peuvent demander aux cadres infirmiers du service de ne pas permettre aux personnes qu'ils désignent d'avoir accès à eux (CSP, Art. R. 1112-47). Aux termes du point 9 de la charte des personnes hospitalisées, « La personne hospitalisée peut recevoir dans sa chambre les visites de son choix en respectant l'intimité et le repos des autres personnes hospitalisées ».
Le directeur d'un établissement public d'hospitalisation dispose d'un pouvoir de police générale dans l'établissement. Si dans l'exercice de son pouvoir de police, il doit prendre les mesures qui s'imposent afin notamment d'assurer la sécurité des patients et du personnel ainsi que le bon fonctionnement du service, et s'il peut porter atteinte à une liberté fondamentale telle que le droit au respect de la vie privée et familiale qui s'exerce à l'occasion des visites rendues au malade par des membres de sa famille, ces mesures doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux buts recherchés et l'atteinte à cette liberté limitée.
Les visites peuvent être ainsi interdites si elles sont jugées incompatibles avec l’état du patient ou la mise en œuvre de son traitement, notamment dans le cadre psychiatrique ou face à un parent injurieux et menaçant vis-à-vis du personnel du service.
Dans le cadre de la crise du coronavirus, des référés libertés ont été introduits s’agissant des résidents en EHPAD, et le Conseil d’État n’a pas sanctionné les refus de visites dès lors qu’elles avaient pour vocation de protéger la santé des résidents, des personnels et des visiteurs et que des autorisations exceptionnelles pouvaient être accordées par le directeur d’établissement.
Le fait d'interdire ou de restreindre fortement les visites aux patients hospitalisés constitue une atteinte au droit aux relations personnelles garanti, notamment, par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui protège le droit à l’intimité de la vie privée. Aussi, pour être régulière, une telle mesure doit être justifiée par un objectif de santé publique. Le centre hospitalier ne donne aucune précision et ne produit aucun des éléments, qu'il est le seul en mesure de détenir, relatifs à l'existence, à la date d'apparition, à l'évolution et à l'intensité du « cluster » qui a justifié les mesures litigieuses et à la nature et la durée exacte de ces mesures. De telle sorte, il n'établit pas que celles-ci étaient nécessaires pour atteindre l'objectif poursuivi et proportionnées à cet objectif.
La circonstance que les enfants aient pu voir leur mère le 25 mai 2021 dans le cadre d'une « rencontre familiale », en présence de personnels soignants, puis le 4 juin 2021 devant le Relais H® de l'établissement, ne saurait suffire pour établir le caractère proportionné des mesures litigieuses.
Aussi, l'atteinte portée au droit au respect à la vie privée et familiale des intéressés n'était pas proportionnée, et la décision est annulée.
Les établissements de santé publics assurent, en tenant compte de la singularité et des aspects psychologiques des personnes, le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades (CSP, Art. L. 6111-1). Pour établir l'existence d'une faute dans l'organisation du service hospitalier au titre du défaut de surveillance d'un patient atteint d'une pathologie psychiatrique, le juge doit notamment tenir compte, lorsque l'état de santé de ce patient fait courir le risque qu'il commette un acte agressif à son égard ou à l'égard d'autrui, non seulement de la pathologie en cause et du caractère effectivement prévisible d'un tel passage à l'acte, mais également du régime d'hospitalisation, libre ou sous contrainte, ainsi que des mesures que devait prendre le service, compte tenu de ses caractéristiques et des moyens dont il disposait.
Un suicide survenu dans le service, alors que la surveillance avait été adaptée au risque, ne laisse pas apparaître de faute pouvant engager la responsabilité (TA Versailles, 30 mai 2024, n° 2201469).
Une femme née en 1968, qui souffrait de troubles psychiatriques depuis 1999, était suivie depuis 2014 par le centre hospitalier spécialisé en raison d'épisodes dépressifs majeurs avec une idéation suicidaire latente. Elle avait fait plusieurs tentatives de suicide ou « mises en scène inquiétantes » en 2014, 2017, 2018 et 2019, notamment en mettant un sac plastique sur la tête. Ella a été à nouveau hospitalisée le 17 février 2021. Le 2 mars, la patiente avait été vue par l'équipe à 22 heures pour la collation. Deux heures plus tard, elle a été retrouvée inanimée dans sa chambre, la tête enveloppée d'un sac plastique. Malgré une intervention immédiate des soins de réanimation, son décès a été constaté dans l’heure qui a suivi. La famille a engagé un recours en responsabilité.
La dernière tentative de suicide datait de deux ans, alors que les médecins avaient constaté une amélioration clinique à la fin de l'année 2020, le compte rendu d'hospitalisation établi le 4 janvier 2021 mentionnant « actuellement en rémission ». Le service infirmier de soins à domicile a estimé que l'état de la patiente, décrite comme aboulique, en retrait social, peu loquace et triste, pouvait justifier de lui proposer le 17 février 2021 une nouvelle hospitalisation, ce qu’elle a accepté. Le compte rendu du 2 mars 2021 mentionne qu'elle confiait se trouver dès le lendemain de son admission moins angoissée et rassurée d'avoir retrouvé le service et sa vie en collectivité. Les jours suivants, elle s’était montrée clinophile et devait être sollicitée par l'équipe, mais rien dans son comportement, dans les jours précédant le passage à l'acte, ne rendait celui-ci prévisible ou nécessitait un renforcement de la surveillance alors exercée selon les seules exigences de l'hospitalisation libre. La patiente faisait l'objet d'une surveillance normale et adaptée à son état qui n'impliquait pas, en l'absence de prescriptions médicales spéciales ou de tout élément de nature à envisager un risque pour sa vie suffisamment prévisible et imminent, l'intervention à son égard de mesures particulières destinées à prévenir une tentative de suicide.
De telles circonstances ne révèlent donc, dans l'organisation ou le fonctionnement du service, aucune faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier.
Alors que le risque suicidaire était connu et qu’une surveillance spécifique avait été prescrite, les insuffisances dans la mise en œuvre sont des fautes engageant la responsabilité (CAA de Paris, 23 mai 2024, n° 23PA02297).
Le 26 avril 2018, une patiente née en 1963, après avoir tenté de mettre fin à ses jours à son domicile par ingestion médicamenteuse volontaire, a fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation sous contrainte en soins psychiatriques.
Lors des premiers mois de 2018, elle avait déjà fait deux séjours en psychiatrie et elle présentait un risque suicidaire majeur. À son admission, la conduite à tenir inscrite dans son dossier mentionnait : « retrait des objets dangereux, surveillance des constances et du comportement car risque suicidaire ». Lors de son examen le lendemain, le médecin a mentionné la nécessité d'assurer « une surveillance du comportement +++ (risque suicidaire) » et a prescrit le retrait de tout objet dangereux.
Le 28 avril 2018 à 10 h, le psychiatre de garde a indiqué, après avoir examiné la patiente, qu'elle souffrait d'un « vécu délirant persécutif interprétatif » et qu'elle continuait à verbaliser des idées suicidaires nécessitant une surveillance pour prévenir le risque suicidaire.
Le même jour, vers 17 h 30, la patiente a été informée de son maintien en hospitalisation sous contrainte. Vers 18 h 45, elle a été retrouvée pendue au robinet de sa douche avec le câble d'un chargeur de téléphone portable qu'elle s'est procurée dans une autre chambre.
La patiente, qui devait faire l'objet d'une « surveillance +++ » en raison du risque suicidaire élevé pour lequel elle a été hospitalisée, se trouvait seule dans sa chambre. La patiente hospitalisée dans la même chambre était absente pour la fin de semaine alors qu'il avait été décidé une hospitalisation en chambre double, afin de minimiser le risque de suicide. Elle a pu déambuler dans le service et entrer en possession d'un câble de téléphone portable, avec lequel elle s'est pendue.
De plus, son traitement n'a pas été adapté, alors que son état de santé s'était aggravé au cours de la journée, ainsi que l'avait rapporté le psychiatre qu'elle avait vu le matin, que l'avait relevé l'infirmière dans les observations pluriprofessionnelles de la journée et que l'avait remarqué son compagnon, venu lui rendre visite dans l'après-midi, qui avait fait part de ses inquiétudes à l'équipe médicale.
L'insuffisante surveillance de la patiente lors de son hospitalisation sous contrainte est constitutive d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité de l’établissement.
L’hôpital fait valoir que, dans la mesure où la patiente souffrait d'une pathologie très grave avec un risque suicidaire majeur, la faute de service commise n'a été à l'origine que d'une perte de chance pour l'intéressée d'échapper au risque de mettre fin à ses jours. Toutefois, l’analyse du dossier montre que le suicide n'aurait pas eu lieu, dans les circonstances de temps et de lieu dans lesquelles il est survenu, si une surveillance renforcée, appropriée à son état de santé, avait été assurée. Ainsi, la faute commise dans l'organisation et le fonctionnement du service ouvre droit à la réparation intégrale des préjudices subis.
Dès lors qu’un risque très important de suicide avait été clairement identifié, le fait que la victime ait pu, dans sa chambre, se procurer un câble d'antenne de télévision suffisamment long, puis se pendre à partir de la barre murale de sa salle de bains révèlent un défaut de surveillance engageant la responsabilité (CAA de Nancy, 6 juin 2024, n° 21NC00930).
Née en 1974 et présentant une dépression, pour le traitement de laquelle elle était suivie par son médecin traitant depuis deux ans et soignée par antidépresseurs, une femme a été prise en charge au sein d’un centre hospitalier général du 11 au 15 mai 2015, à la suite d'un épisode dépressif majeur et d'idées suicidaires, survenus dans un contexte de séparation d'avec son époux depuis quelques semaines. Après modification de son traitement antidépresseur et amélioration de son état, elle a été transférée, à l'issue de son hospitalisation, dans un établissement privé de soins psychiatriques.
Le 6 juin 2015, soit dix jours seulement après son retour au domicile, elle a, de nouveau, été conduite aux urgences du centre hospitalier général en raison d'une intoxication médicamenteuse volontaire avec prise d'alcool et suspicion de pendaison. Le lendemain, à 13 h 32, la patiente a eu un entretien avec le médecin psychiatre de l'établissement public de santé, qui préconisait une hospitalisation sous contrainte et envisageait de la transférer vers un centre hospitalier spécialisé.
Le 8 juin 2015, à 7 h 30, la patiente, qui s'était opposée à un tel transfert, a été retrouvée morte dans sa chambre d'hôpital. Elle est décédée par pendaison au moyen d'un câble d'antenne de télévision attaché à la barre murale de sa salle de bains.
Le rapport d'expertise a estimé que la prise en charge n'avait pas été fautive.
La patiente a été conduite aux urgences du centre hospitalier général le 6 juin 2015, en raison d'une intoxication médicamenteuse volontaire avec prise d'alcool et suspicion de pendaison. Elle avait déjà été hospitalisée dans ce même établissement, du 11 au 15 mai 2015, en raison d'un épisode dépressif majeur avec des idées suicidaires.
Compte tenu de la dégradation de son état de santé, le médecin psychiatre du service a préconisé, dès le 7 juin 2015, une hospitalisation sous contrainte, avec surveillance rapprochée et soins psychiatriques intensifs. Si la patiente s'est opposée à son transfert vers le centre hospitalier spécialisé, il résulte du rapport d'expertise qu'une discussion avec la famille sur ce point aurait dû avoir lieu le lendemain. Dans ces conditions, compte tenu du risque très important de suicide par pendaison de la patiente, qui avait été clairement identifié par le centre hospitalier, les circonstances que la victime ait pu, dans sa propre chambre ou dans une chambre voisine, se procurer un câble d'antenne de télévision suffisamment long, puis se pendre à partir de la barre murale de sa salle de bains, révèlent un défaut de surveillance constitutif d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier.
Par suite, alors même que la patiente se trouvait en hospitalisation libre, que la porte de sa chambre était dotée d'un hublot, que la « quasi-totalité » des câbles avaient été retirés et que des visites régulières ont été effectuées par le personnel soignant dans la soirée et la nuit qui ont précédé son suicide, constaté le 8 juin 2015 à 7 h 30, la responsabilité du centre hospitalier est engagée.